LES PROBLÈMES DU TRAVAIL
AT
tituent un capital industriel. Ils appliquent pour des raisons
lechniques un système déjà avancé de division du travail
avec des équipes relativement nombreuses et nettement spé-
cialisées dans les divers stades de la production. Tisserands,
lanneurs, arçonneurs, tondeurs, foulons, teinturiers ne sont
pas interchangeables. La production d’une équipe commande
le travail de l’équipe suivante, et tout est commandé par les
besoins du marché, par la demande probable.
Aussi, de bonne heure, la draperie connaît-ellé les irrégula-
rités dans le rythme de la production, le chômage et aussi la
coalition, patronale et ouvrière. C’est à propos de la draperie
que, dès le xnr° siècle, Philippe de Beaumanoir définit la coali-
tion, « alliance qui est faite contre le commun profit », et dé-
crit une grève des ouvriers drapiers de Rouen. Pour résister
aux réclamations de la main-d'œuvre organisée et pour échap-
Per aux règlements corporatifs, les marchands drapiers, en
tout pays, suivent la même tactique ; ils font travailler hors
de la ville et de sa banlieue, autour des grandes villes dra-
Pières flamandes, dans les vallées qui entaillent le pays de
Caux, dans les campagnes du Surrey ou du Norfolk. Ce travail
dispersé à la campagne, le domestic system des historiens an-
glais, est pratiqué par des paysans, qui restent paysans, et
cherchent à se procurer un salaire d’appoint en faisant battre
le métier prêté ou loué par le capitaliste urbain. Celui-ci peut
leur faire fabriquer des étoffes que n'accepteraient pas les
gardes-jurés du métier ni les autorités municipales qui mar-
quent du sceau de la ville les pièces de drap. Ce sont des étoffes
plus légères, plus fines, plus séduisantes et moins coûteuses,
celles que réclame, avec l’évolution de la mode, le marché
international. La new drapery est la conséquence du domestic
system. Mais celui-ci met l’ouvrier à domicile dans ja dépen-
dance du capitaliste, et agit par voie de conséquence sur la
position des ouvriers organisés en communautés.
Or la situation de la draperie se reproduira, au xvi* siècle,
dans d’autres industries, à la fois pour des raisons techniques
€t pour des raisons économiques. Ces créations de la Renais-
sance sont ou bien des industries de luxe, comme la soierie,
ou des industries intellectuelles, comme l'imprimerie. Les
unes et les autres exigent un capital industriel, qui dépasse la
capacité de l'ordinaire maître de métier : ici des moulins et