158 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
du centre et du Nord, les grandes maisons féodales, telles
que' celles de Vérone, de Montferrat, d’Este, se super-
posent à une foule de vassaux et de vavasseurs (valvas-
sores), au-dessous desquels on retrouve des nobles servi-
teurs ou fonctionnaires du type carolingien, les masna-
diers (masnadores) qui possèdent un moment en Toscane
jusqu’au tiers du sol. Quant aux royaumes ibériques, les
conditions mêmes de leur développement, liées à la con-
quête incessante sur les musulmans, y ont multiplié les
propriétaires nobles, depuis ceux du premier rang, qu’on
nomme les riches hommes (ricos hombres, magnates, opti-
males), presque aussi puissants en Aragon que les rois,
jusqu’à ceux de second ordre, qu’on appelle tantôt les
infanzones, les vavasseurs (valvassores, vasallos), les che-
valiers (caballeros), tantôt enfin, comme en Italie, les mas-
nadiers (masnaderos). Ce sont donc quelques centaines
de milliers d’hommes, soldats ou fonctionnaires, qui ont
Pris possession des terres de l'Occident ou qui en ont reçu
en fief des parties plus ou moins étendues.
Les grands domaines à l'époque féodale. Tendance au mor-
cellement. — La Propriété noble 5e présente parfois sous
l’aspect du grand domaine, mais le plus souvent, quand il
s’agit des fiefs de la noblesse de second ordre, de beaucoup la
plus nombreuse, elle prend la forme de moyenne ou de petite
propriété. Les biens royaux et les biens d’Église rentrent
au contraire presque tous dans la catégorie des grandes
propriétés, bien qu’ils soient rarement concentrés et qu’on
les rencontre le plus souvent disséminés. La fortune terri-
toriale des nobles de premier ordre peut comprendre un
nombre considérable de manses ou domaines. C’est ainsi
qu’en Angleterre, un grand baron possède 793 manses,
répartis entre 20 comtés. En Italie, certains grands sei-
gneurs ont eu jusqu’à 11.000 manses. On en connaît un
qui possédait au xr° siècle 90.000 hectares. D’autres
avaient 500 à 600 manses ; le Saint-Siège lui-même déte-