Full text: Le travail dans l'Europe chrétienne au moyen âge (Ve-XVe siècles)

240 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL 
Marseille, la confrérie marchande du Saint-Esprit soulève 
la ville basse des matelots et proclame le consulat, l’auto- 
nomie municipale. Le Mans (1069), Noyon (1027), Corbie, 
Amiens (1030) s’insurgent pour conquérir la liberté du 
marché. À Beauvais (1074-1099), ce sont les teinturiers 
qui mènent le combat contre l’évêque. À Cambrai (1057- 
1076) et à Cologne, ce sont de riches marchands qui 
engagent une lutte acharnée contre l’archevêque. Dans 
cette phase initiale, la plupart des révolutions syndicales 
échouent, mais il en est qui réussissent. Parfois, comme à 
Saint-Quentin (1080), à Douai, à Arras, à Saint-Omer, la 
gilde est parvenu par des moyens pacifiques à conquérir 
les premières libertés. Dès le x1° siècle, en Italie, en France 
méridionale, en Béarn, les classes marchandes ont obtenu, 
en certains lieux, de participer à la vie politique par 
l’élection des doges, des consuls, des évêques, ou ont été 
associées à titre consultatif à la vie administrative et à 
l’administration financière de la ville. Dans la plupart des 
pays d’Occident, les marchands, à défaut de droits civils 
et de droits politiques, ont obtenu des exemptions fiscales, 
des privilèges économiques, surtout une juridiction spé- 
ciale (jus mercatorum), qui les soustrait aux caprices de 
la justice locale, et une paix particulière (paix de la ville), 
imposée à tous par serment, qui garantit la sécurité de 
leurs personnes et de leurs biens. 
Ces concessions étaient insuffisantes. Aussi, au xIT° et 
au XII° siècle, marchands et ouvriers se fédèrent-ils en 
vastes syndicats, tantôt publics, tantôt secrets, appelés 
paix, communes, communia, conjurationes. En vain l’Église 
essaie-t-elle de barrer la route par la voix de ses canonistes 
at de. ses saints, d’Yves de Chartres, de Bernard de Clair- 
vaux, à ces confédérations de travailleurs « au nom nou- 
veau et exécrable », ainsi que les qualifie l’historien Guibert 
de Nogent. Vainement, la haute féodalité, et même parfois 
l’État monarchique, tentent-ils d’enrayer la révolution 
par la rigueur de répressions souvent atroces. Partout le
	        
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