LA CONDITION DES CLASSES URBAINES 273
l’asile de l’indépendance et la garantie du bien-être. L'as-
sociation volontaire et disciplinée les mit à l’abri des
caprices et du despotisme des anciens pouvoirs féodaux,
sn leur donnant la force. Elle les préserva des excès de
la concurrence, du chômage et de la surproduetion, du
parasitisme des intermédiaires, des manœuvres des spécu-
lateurs et des exploiteurs du travail. Patrons et ouvriers
purent travailler, sans l’âpre souci du lendemain, sûrs
de trouver däns le petit atelier l’exercice de leur activité
réglée, et sur le marché urbain la vente de leurs pro-
duits. Les statuts des métiers rendaient le patronat
accessible à tous, établissaient un heureux équilibre
entre les droits et les devoirs. de chacun. Ils mainte-
naient une certaine égalité dans la production et dans
la répartition. Ils empéchaient la formation de grandes
fortunes parmi les patrons ; ils favorisaient la diffusion de
l’aisance. L’ouvrier était sûr de trouver l’emploi de ses
bras, quand il se rendait sur la place publique, pour y
louer son travail, soit à la journée, soit à la semaine ou
pour uni plus long terme. Il n’avait pas à redouter la sura-
bondance de main-d’œuvre, due à la concurrence des
forains et des femmes. Si la besogne était dure, si la durée
de la journée de ‘travail variait en certains métiers, par
exemple à Paris, de 16 heures à 8 heures et demie, dans
d’autres de 14 heures à 11 heures, pratiquement, en dédui-
sant les intervalles des repas, elle s’abaissait entre huit et
treize heures. Le travail de nuit, rétribué à part quand on
l’autorisait, était généralement interdit. De nombreux
jours de fêtes ménageaient à l’artisan des intervalles de
repos, dont l’ensemble représentait un quart au moins de
l’année.
Les salaires n’étaient pas sujets à de brusques écarts et
correspondaient assez exactement au prix de la vie. Ceux
des ouvriers ne différaient pas sensiblement des gains des
patrons. À Londres, par exemple, au xIV° siècle, si le maître
suilier gagnait suivant les saisons 5 pence et demi à 4 pence
BOISSONNADE.