ÉVOLUTION DU COMMERCE ET DE L'INDUSTRIE 389
L'esprit des gouvernements urbains à la fin du moyen âge.
— Les classes commerçantes et industrielles ne réussirent
pas d’ailleurs en général à doter les villes d’institutions
stables et équitables. Démocraties ouvrières ou aristo-
sraties bourgeoises n’eurent au cœur qu’an sentiment
commun, le patriotisme municipal, qui leur inspira sou-
vent un attachement admirable à la conservation de
l'autonomie, à Ja grandeur et à la gloire de leurs cités.
Mais, sauf dans les centres, où s’établirent des gouverne-
ments mixtes, les administrations urbaines furent animées
d’un étroit égoïsme de caste, contraire à tout esprit de jus-
tice et de véritable égalité. Elles cherchèrent à monopoliser,
tantôt en faveur de la bourgeoisie, tantôt en faveur du
peuple, le pouvoir et les charges. Leur despotisme s’exerça
ici, à l’encontre de la bourgeoisie riche, là, au détriment des
artisans et des salariés. Les ouvriers eux-mêmes, quand ils
furent les maîtres, non contents d’opprimer les bourgeois,
se déchirèrènt entre eux. Chaque classe gouverna dans son
intérêt exclusif, essayant de régenter le travail, de régler
la production et parfois la répartition de la richesse à son
avantage. L'esprit d’intrigue et la soif de domination se-
manifestèrent chez les bourgeois comme chez les prolé-
taires. Les premiers donnèrent souvent plus d’importance
à la fortune qu'aux talents dans l’attribution des dignités
municipales. Les seconds eurent une foi aveugle dans les
pires aventuriers et dans les bas démagogues ; elles mirent
sur le pavois à Paris un écorcheur, à Gand un chanteur des
rues, à Liége un paveur. Ils ne surent maintenir, ni les uns
ni les autres, le bon ordre et la probité dans leur gestion.
Ils ne songèrent pas davantage à se dégager de lesprit
étroit de l’ancienne économie urbaine. Ils n’eurent qu’un
idéal : la conservation et l’accroissement des privilèges par-
ticuliers de leur cité et de ses groupements. C’est pourquoi
ils défendirent, même par les armes, leurs monopoles com-
merciaux et industriels. Bruges prétendit se réserver le
commerce d'importation des laines et des épices aux Pays-