64 LES ORIGINES HISTORIQUES DES PROBLÈMES ÉCONOMIQUES bonne heure. Dès 1538, les instructions du sieur d’Yzernay portaient, d’après Rott, que le roi était disposé « à permettre à Berne de s’approvisionner de sel de Provence, mais à la condition que ce canton appuyât la politique suivie par la France à l’égard de la Franche-Comté ». Et le même Rott constate qu’en 1549 « le sel de Peccais commençait à entrer en concurrence avec celui de la Franche-Comté sur les mar- chés de Berne ». En 1558, Mathieu Coignet reçoit pour instruc- tions de ne pas présenter comme irrévocable le refus, d’abord opposé aux Bernois, « d’une nouvelle traite de sel de Peccais franche des droits de gabelles ». C’est aussi au Valais que des traités, à partir de 1564, assurent la fourniture du ‘sel de France. Il s’agit en effet de lutter contre le duc de Lorraine, qui tente d'attirer les Suisses dans ses intérêts par l'offre du sel de son duché, contre Anguisciola, qui offre aux cantons occi- dentaux la traite du sel comtois, même contre le duc de Sa- voie, qui ne craint pas, vers 1575-1576, de faire des largesses avec le sel que la France a bien voulu lui accorder. Avec l'impécunieux Henri IV, ce problème du sel va devenir encore plus important. Le roi, désespérant de liquider ses dettes suisses, « cet abîme », ne voit qu’un moyen de ne pas perdre l'alliance des cantons, c’est de leur engager le produit de la ferme du sel en Languedoc. En 1601, Méry de Vic obtient que cent mille écus en sel de France seront agréés en représentation de six cent mille écus de dettes, et l’al- liance de Soleure de 1602 est en partie fondée sur le sel. Le grognon Sully trouve ces conditions onéreuses. Mais Méry de Vic démontre le danger de la concurrence des Comtois et des Lorrains, qui baissent leurs prix pour conquérir l'alliance helvétique : « L’establissement de la traite du sel de Pro- vence » dans les cantons, dit-il, est « un commerce » appelé « à croistre tous les jours au grand advantage de la France et très grande incommodité et perte de tous ses ennemis. » Sa politique triomphe en Valais, en 1607, où Henri IV, contre une augmentation de pensions de 6.000 livres, obtient des dizains valaisans qu'ils renonceront au sel comtois et italien, moyennant l'engagement d’une livraison annuelle minima de 9.000 minots de sel de Provence. Et, pour assurer le fanc- tionnement du système, on installera à Sion ou à Saint-Mau-