100 LES ORIGINES HISTORIQUES DES PROBLÈMES ÉCONOMIQUES tions tiennent dans les ouvrages juridiques ou dans les con- troverses théologiques et morales. Il est remarquable que les défenseurs du principe même du prèt à intérêt, comme Cal- vin, et ses adversaires les plus intransigeants, sont d’accord sur ce point, à savoir que certaines opérations de crédit sont indispensables au fonctionnement de la vie commerciale du “emps. Par ce qui précède, on voit quel était l’état de tension du marché lorsque s’ouvrit, en 1557, entre la France et l’Es- pagne la guerre dite de Saint-Quentin. Or la guerre, au xvi° siècle comme au xx°, se faisait avec du papier. Au lendemain de son avénement, Philippe IL s’était trouvé en face d’une situation financière inextricable. Comme les questions financières, en ce temps, se mélaient aux questions religieuses cn vertu des lois canoniques sur le prêt à intérêt, Philippe consulta ses théologiens ("). Ils étaient d’avis que, les engagements pris par Philippe étant usuraires, il lui était li- cite, en conscience, de ne pas les tenir. Mais on se rendit compte qu’une révocation générale des dettes rendrait impos- sible tout recours ultérieur au crédit, et on proposa aux créan- ciurs une sorte de funding : on les indemnisetait non en ca- pilal, mais en rentes perpétuelles 5 %, au lieu d'obligations à prochaine échéance à 10 et 14 . Comme ils résistaient, un décret leur donna jusqu’au 1” janvier 1557 pour accepter ces juros, ou tout perdre. La banqueroute prenait l’allure d’une consolidation forcée de la dette flottante. Le résultat, qu’on aurait pu prévoir à Valladolid, fut la chute des juros à 85, puis à T5 %. Les Fugger, atteints en outre par les obstacles mis à l’exportation des métaux pré- cieux, se crurent assez forts pour résister. Ils durent céder plus-lard, lorsque les juros ne valurent plus que 50 ou 40 %. Dans l'intervalle les Welser, les Schetz avaient capitulé, puis les autres à leur exemple. Le crédit français semblait meilleur, même après le dé- sastre de Saint-Quentin. Le vrai vainqueur de cette bataille, Fmmanuel-Philihert de Savoie. avait pronosé à Philippe II (1) Haebler nous dit que le cardinal Siliceo, son ancien précepteur, lui conseilla d’employer le produit des mines d’argent de Guadalcanal pour écraser les ennemis de la religion, et d’augmenter ce trésor en retirant des mains des usuriers les biéns engagés