LES INVASIONS, RUINE DU TRAVAIL 31 flammes ce qu’ils ne peuvent enlever. Les Huns font table rase et ne laissent après eux que le désert. Les Vandales saccagent tout avec une telle perfection que leur nom a symbolisé la fureur même de détruire et les Anglo-Saxons mériteraient un renom semblable. Les Hérules ont réduit à la misère l’Italie du Nord par leurs rapines, et Paul Diacre qualifie les Lombards du nom de « nation de voleurs», aussi adonnés au vol que prompts au meurtre. Aux époques mêmes où les Barbares ont stabilisé leurs établissements, les guerres des rois et des peuples, des tribus et des familles, perpétuent ces MŒuUrs destructives de toute vie sociale et économique régulière et productive. Dans les expéditions, telles que celle des Austrasiens en Auvergne et en Aquitaine au v1° siècle, ce qui reste de la prospérité de ces pays disparaît sous les mains brutales des Barbares, qui incendient les moissons, coupent les arbres fruitiers, arrachent les vignes, pillent les greniers et les celliers, poussent devant eux des troupeaux de captifs et d’animaux domestiques, semant autour d’eux la désolation et-la mort. Parfois l’exeès du désespoir arme les paysans contre eux. Les Bagaudes d’Espagne au v° siècle ont ainsi lutté contre les Suèves et les Visigoths. Mais en général, la résistance est nulle parce que les masses la savent inutile. Dans une société semblable, livrée sans miséricorde à tous les abus de la force brutale et de la barbarie déchaînée, la vie économique se ralentit et plus d’une fois semble près de s’éteindre. La main-d'œuvre agricole se raréfie, sous l’influence des grandes tueries d'hommes, des razzias d’esclaves, de la famine et des maladies épidémiques devenues presque permanentes. La production est décou- ragée par l'insécurité croissante. Partout en Occident comme en Orient, s’étendent de vastes solitudes, d’im- menses espaces, vides d'habitants et de cultures. Dans tous les documents, il est fait mention de ces terres désertes, hermes ou vacants et gâtines (cremi, vastinæ, solitudines,