LA PROPRIÉTÉ EN OCCIDENT . 109 de demi-civilisation. Une élite seule à l’époque carôlin- sienne s’est élevée à la conception des plaisirs intellectuels. Pour les autres membres des classes aristocratiques la vie sensuelle, purement matérielle, sous ses divers aspects, reste le seul idéal auquel ils puissent se hausser. Le déclin de la petite propriété et du travail libre en Occident. — Cette aristocratie rurale violente, âpre, ambi- tieuse, qui, dans le grand domaine disciplina et asservit le travail, poursuivit avec ténacité la destruction de la petite propriété libre. Celle-ci la génait dans son expansion, et l'indépendance des petits propriétaires portait ombrage à son autoritarisme. Les petits propriétaires libres sont restés longtemps assez nombreux en Occident, pour repré- senter une puissance sociale avec laquelle rois et grands durent compter. Cymrys gallois et fines irlandais, bont viri armoricains, ceorls anglo-saxons, frilingen germaniques, minofledes burgondes, possesseurs ingénus' (libres) gallo- romains, allodiales visigoths, ahrimanns lombards, primi homines, bozadores italiens, ils se ressemblent tous par bien des traits. D'abord par la médiocre étendue de leurs domaines qui n’est guère que de 120 acres (40 hectares) (le hide oule hufe), en Angleterre et en Germanie, et qui descend même souvent au-dessous dans le manse gallo- romain. Mais le petit propriétaire y est maître absolu, comme le grand dans sa villa ou sa curtis. Il a droit de jouissance sur tous les biens de la communauté de village germanique, ou sur les communaux des bourgs romains, Sa propriété est inviolable, comme sa personne. Elle est sous la protection spéciale de la coutume et de la loi. Il a le droit de porter les armes ; il siège au tribunal avec ses pairs; il est appelé aux assemblées. Il administre les affaires de son village ôu de son bourg, formant avec ses voisins le conseil de la communauté, qu’on trouve même en pays romain (conventus publicus vicinorum). Mais il est en butte à la jalousie tracassière du grand propriétaire, parce