LES CAMPAGNES DANSPL'ÈRE FÉODALE 175 et ailleurs le morcellement extrême du manse, provenant de l'introduction de Pégalité des partages, rendent le travail malaisé et s'opposent aux améliorations culturales. Rien n’encourage d’ailleurs le vilain à donner au capital foncier plus de valeur, puisqu’il n’en est pas le maître et qu’il ne peut ni le transmettre facilement, ni surtout le vendre, ni l’aliéner à son gré, ni recueillir le fruit de son effort. Rien ne l’excite à en tirer un rendement intensif, puisqu’il n’aurait pas de facilités pour écouler le produit supplémentaire qu’il en retirerait. Loin d’être l’associé de l’exploitant, le propriétaire dans le régime féodal n’est, en regard du paysan, qu’un parasite dur et fantasque, pour lequel toute amélioration du sol n’est que prétexte à quelque exaction nouvelle. Il décourage les initiatives et tarit à leur source les énergies, en enlevant au vilain une part exorbitante du fruit du labeur de ce dernier, de sorte que le travail se trouve à demi frappé de stérilité. L’erreur initiale des féodaux fut en effet d’exploiter le paysan au lieu de l’aider à exploiter la terre. L'économie agraire à l'époque féodale en Occident et les avantages de la condition du vilain. — Aussi peu intelligente qu’ait été l’économie agraire à ’époque de ia première féodalité d’Occident, elle a cependant assuré aux paysans quelques-unes des conditions élémentaires de Pexistence. Dans une société où la” vie humaine était liée d’une manière presque exclusive à la jouis- sance de la terre, l’occupation de parcelles du sol, monopolisé par les classes féodales, a seule permis à des millions d'hommes de maintenir leur vie. Fixé sur cette terre qui Ini permet de vivre, le vilain n’est plus l’épave Hottante, l’être déraciné, l’objet mobilier ballotté de domaine èn domaine qu’était l’esclave. Il a. son foyer, sa cabane, sa famille. Il ignore les angoisses du chômage, de la recherche du travail et l’inquiétude du salariat. La terre abonde et tout cultivateur est assuré d’en obtenir