210 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL vegardes et des privilèges, telles que la liberté entière du trafie et l’exemption des droits les plus onéreux. L'Église les bénit, les couvre de sa tutelle, les inaugure par des cérémonies religieuses. Une justice spéciale, analogue à celle des célèbres foires de Champagne, confiée à des chanceliers et à des gardes, y maintient le bon ordre et l’équité des transactions. Les marchands, pour y accéder, jouissent de sauf-conduits, garantis par des traités. Ils y bénéficient du droit d’asile ; ils y sont à l’abri des droits d’aubaine et de représailles, à couvert de toutes pour- suites. On tarife en leur faveur le prix des logements et des vivres. Le commerce de tous les pays d’Orient et d’Ocei- dent se donne rendez-vous dans les plus célèbres de ces assises. Chaque pays s’efforce d’organiser les siennes, l’Angleterre, par exemple, à Stourbridge, l'Allemagne à Aix-la-Chapelle, à Francfort et à Constance, les Pays-Bas à Lille, à Messines, à Ypres et à Bruges, la Castille à Séville et à Medina del Campo, l'Italie à Bari, à Lueques et à Venise. Mais c’est en France qu’elles ont surtout prospéré, aux points de passage entre les grandes régions de l’Occi- dent, notamment à Nimes, à Beaucaire et à Bordeaux, à Chalon-sur-Saône, à Caen, à Rouen, à Corbie et à Amiens. Deux grands centres français ont eu à cet égard une célébrité universelle : l’Ile-de-France et la Champagne. Dans la plaine de Saint-Denis, chaque année du 11 au 24 juin, (au Lendit), affluent les marchands. Tls viennent plus nombreux encore aux grandes foires champenoises qui se succèdent annuellement de janvier à octobre, pen- dant 16 à 50 jours pour chacune, à Lagny, à Bar-sur-Aube, surtout à Provins et à Troyes. Ces dernières ont eu, depuis la deuxième moitié du XII® siècle jusqu’à la première moitié du xrve, une impor- tance capitale. Dans ces plaines de la Haute-Seine et de la Marne, placées au point de rencontre des grandes voies européennes qui unissaient les pays de la Méditerranée