L’ÉMANCIPATION URBAINE 243 normande, c’est ce minimum d’émancipation qui fut con- quis par les populations urbaines. Un petit nombre seule- ment de groupements urbains, dans les régions de l’Italie, de la France méridionale, de la France du Nord et des Pays-Bas, où la vie commerciale s’était le plus développée, parvinrent à la plénitude de l'indépendance, et formèrent de véritables États, des républiques bourgeoises, placées sur le même pied que les anciens États féodaux. Mais le résultat général du mouvement communal, de ce qu’on pourrait appeler la première révolution syndicaliste, n’en fut pas moins favorable aux masses qui vivaient dans les villes de leur travail, de l’exercice du commerce et de l’in- dustrie. Pour la première fois, des milliers d’hommes, qui formaient le dixième probablement de la population de l’Occident, conquirent l’égalité et la liberté civiles, ces biens qui n’avaient été reconnus dans l’antiquité et dans le haut moyen âge qu’à des minorités infimes. Pour la première fois dans les villes, la masse des travailleurs, depuis le grand marchand jusqu’au compagnon, se trow- vèrent membres libres d’une association libre,, l’associa- tion urbaine pourvue d’un droit légal et de privilèges distinetifs. Les libertés civiles et économiques des classes urbaines: — Le groupement urbain, la ville, naît vraiment à cette époque à la vie dont elle n’avait auparavant que l’ombre. Elle devient un organisme jeune et vigoureux, avide de s’enrichir d’un sang nouveau, et où la fonction économique prime toutes les autres. Soucieuse de s’enrichir de capital humain ou de main-d’œuvre, l’ensemble de la commu- nauté urbaine, la bourgeoisie, comme on l’appelle, concède la jouissance de son droit et de ses privilèges aux paysans serfs ou vilains, aux artisans, aux marchands, qui viennent se réfugier dans son enceinte. Elle exerce légalement ce droit d'accueil. Pour être admis à la jouissance entière des privilèges de la bourgeoisie, il suffit de résider un an et un