258 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL interdit les coalitions des artisans ; il leur a refusé le droit de réunion et de grève, sous peine de bannissement et de mort. Il a décrété lobligation du travail. On à vu des oligarchies patriciennes conclure des traités pour se garantir l’extradition réciproque des éléments ouvriers suspects. Maîtres des conseils de ville et des échevinages, les patriciens purent réglementer à leur gré la durée du travail, le taux des salaires, les tarifs des denrées, sou- mettre à une discipline étroite le commerce et les métiers, édicter les statuts corporatifs ou les reviser. Spécialement dans les centres où apparut la grande industrie, grands marchands et grands entrepreneurs usèrent de leur auto- rité, pour régler les conditions et la police du travail, d'une manière si arbitraire, qu’ils réduisirent les ouvriers à une forte d’esclavage. Faste et arrogance du patriciat. — L’oligarchie patri- sienne acheva d’exaspérer les masses par son arrogance et par’ l’étalage de sa fortune. Dans les villes du Nord, les grands bourgeois prennent volontiers le qualificatif de damoiseaux ; partout, ils se parent de titres honori- fiques. Ils dépassent parfois en faste la vieille aristocratie foncière. « C’est le métier qui fait maintenant la richesse », disait un grand tanneur de Bâle à son hôte, l’empereur Rodolphe de’ Habsbourg. Aux entrées des princes, ils se distinguent par leur luxe, comme on l’observe à Cologne an 1236, lorsque les 1.800 premiers bourgeois de la ville reçoivent la fiancée de Frédéric IT. Ils donnent à leurs filles des dots plus élevées que les nobles. Ils se font construire de belles maisons de pierre, parfois couronnées de tours et de créneaux. Brunetto Latini admire en France leurs demeures « grandes et pleinières et peintes, leurs delles chambres pour avoir joie et déduit », avec les ver- zers qui les entourent. Ils vivent noblement, observe un satiriste champenois ; « ils portent vêtements de rois, nourrissent autours, faucons et éperviers ». Leurs femmes