LA CONDITION DES CLASSES URBAINES 275 la rue et s’avançaient à la rencontre les unes des autres. Les maîtres y avaient au rez-de-chaussée leur ouvroir, servant à la fois d’atelier et de boutique. Ils se groupaient d’ordinaire avec les autres membres du métier, dans le même quartier, dont les rues portaient chacune le nom d’une corporation. Là, le long des avenues étroites et sombres circulait le clientèle aux heures de travail et de vente, le long des étalages protégés par des auvents, au-dessus desquels se balançaient en grinçant des enseignes parlantes. Piétons, chevaux, voitures s’y rencontraient avec des animaux domestiques, surtout des porcs, vaguant auprès des tas d’ordures. Les cris des annonces de chaque profession s’y faisaient entendre dans leur saveur originale, depuis celui du tavernier et du cuisinier vendeur de sauces, jusqu’à celui du raccommodeur de hanaps et du fripier. Les familles vivaient dans une promiseuité souvent primitive, en quelques pièces sommairement meublées de coffres, de tables et d’ustensiles divers. L’habillement de louvrier et du petit patron consistait en solides étoffes de laine ou de toile ; il n’exigeait pas de grands frais. Tou- tefois peu à peu l’aisance grandissante suscitait le goût lu confortable. Les inventaires de la fin du x1I1° siècle at de la première moitié du XIV°, ainsi que les registres des impôts, attestent que de modestes fortunes s'étaient for- mées et que les classes laborieuses des villes avaient davan- tage le souci d’une alimentation substantielle, d’un ameu- blement plug soigné, où figurent la vaisselle d’étain, le linge de table, des vêtements faits d’étoffes plus variées at moins grossières. L'usage du linge de corps se généra- lisait. L'hygiène avait réalisé de grands progrès, comme le montrent la multitude des établissements de bains ou stuves publiques et l’existence de cuves à baigner dans let maisons privées. La condition morale des classes laborieuses urbaines. — La condition morale des classes laborieuses s’était aussi