CONDITION DES CLASSES RURALES 315 de propriété. De la même manière agissent le bail perpétuel (aforamento) en Portugal et le contrat (livello) à rente foneière (fitto), qui se généralise en Italie. Dans ce dernier système, le paysan était même dispensé de droits de muta- tion (lods et ventes) ; le propriétaire gardait seulement le droit de préemption en cas*de vente; il empéchait la prescription de ses titres, en faisant renouveler le contrat à des intervalles plus ou moins longs. Afnsi s’accomplit peu à peu un des événements les plus importants de l’histoire, la translation du droit de propriété réelle, sous la forme de baux à longue durée ou héréditaires, en attendant que les derniers vestiges de l’ancienne sujétion fussent entiè- rement abolis. Caractères de la propriété paysanne, sa faible étendue et son morcellement. — La propriété paysanne qui fit alors son apparition, sous ces modestes déguise- ments, conserva l'aspect qu’elle présentait à l’époque féodale. Elle se composa de petits domaines souvent formés de parcelles disséminées. Elle tendit à se mor- celer à l’infini, par suite de l’égalité des partages ou par le hasard des ventes et aliénations. En Allemagne, le manse rural (hufe), qui variait de 7 hectares et demi à 50 en étendue, diminua des trois quarts en superficie moyenne, depuis le x11° siècle. En Angleterre, rarement le copyholäder, comme le freeholder, eut plus d’une vergée (10 à 22 hectares) de terre; souvent il n’en possédait que la moitié et bon nombre de tenures n’avaient que 4 acres et demi (moins de 5 hectares), avec une parcelle de pré. En Picardie, les laboureurs à bœufs avaient d’ordinaire une dizaine d'hectares. Le morcellement alla si loin qu’il y eut en Roussillon des bordes (domaines ruraux), formés de 16 à 62 parcelles, qu’en Picardie des laboureurs appelés haricotiers s’associaient pour cultiver ensemble leurs par- celles. dont l’étendue n’était pas suffisante pour leur per- mettre d’avoir des attelages, et qu’en Italie les communes