34 LA FIN DU MOYEN AGE le suif, la potasse, le goudron, le bois, les pelleteries, les fourrures, le coton, la soie, la laine, aussi bien que sur les lainages, les soieries, les futaines, les couvertures, la mer- cerie, les savons. Ils ont entrepris l’exploitation des mines, créé des établissements métallurgiques, des fabriques de tissus, et partout ils font fructifier les capitaux qu'ils engagent. Ces grands manieurs d’argent, ces grands brasseurs d’affaires sont animés de l'esprit de cosmopolitisme et détachés des étroits intérêts urbains. Volontiers, au contraire, ils se font les agents des rois et des princes ; ils ont été les meilleurs auxiliaires de la monarchie absolue, dont ils ont servi les intérêts en servant les leurs. Souvent, ils ont adopté la vie de magnificence et de luxe de la plus haute aristoeratie. Ils demeurent, comme les patriciens de Venise, comme notre Jacques Cœur, comme les Portinari à Bruges, dans des palais ou des hôtels dignes des princes. Ils se piquent volontiers de pratiquer le mécénat et ils ont figuré parmi les intelligents promoteurs de la Renaissance. Mais ils ont apporté dans l’organisation économique médiévale un trouble et des mœurs pernicieuses : la spécu- lation effrénée, la pratique des accaparements et des mono- poles, voire même celle des Kartells, l’absence de serupules la plus complète et le mépris de toute loi morale. On leur reproche, comme le fait une Diète allemande, «de détruire toute possibilité de travailler pour le moyen et le petit commerce », ou, ainsi qu’un contemporain l’écrit à propos de J acques Cœur, « d’appauvrir mille bons marchands pour enrichir une personne ». Ils ébranlent par leurs manœuvres et leurs faillites, qui ne nuisent en rien, dit un pamphlétaire, « à leur opulence », le travail et les échanges loyaux. Ils troublent l’harmonie de l’ancienne organisation urbaine ; ils la minent ou l’annihilent, en rendant illusoires les règles protectrices qu’elle a vait fait prévaloir. Ils forcent une partie de la population indus- trielle et commercante à subir leur domination. Ils s’ar-