LA CRISE FINANCIÈRE EUROPÉENNE DE 1559 - 103
Les Welser ont tenu longtemps. En 1566 Gresham, qui leur
emprunte, les appelle encore « gens de grand crédit dans là
chrétienté ». Leurs difficultés réelles ne commenceront qu’en
1587, et ils essaieront de se sauver par où ils s’étaient enri-
chis, par le commerce d’outremer. Ils ajourneront ainsi jus-
qu'en 16!4 une faillite retentissante. Les Fugger, en raison
même de l’étendue de leurs affaires, seront cruellement at-
teints : tout leur manque à la fois, papiers espagnols, papiers
de la cour de Bruxelles, des Etats, des provinces belges, de la
ville d’Anvers, qui devient mauvaise payeuse. À la liquidation
espagnole de 1563 ils ont perdu 370.000 ducats (*). Leur bi-
lan de 1563 présente un passif presque égal à leur actif ;
celui-ci ne comprend plus de biens-fonds, partagés entre des
membres de la famille que n’unit plus la belle solidarité d'au-
trefois, et le commerce des marchandises ne joue plus dans
leurs affaires le même rôle qu’autrefois.
Il est d’ailleurs impossible de dire en quelle mesure la crise
financière a troublé la vie commerciale. On nous dit bien,
partout, que l’activité en somme malsaine des spéculateurs
en valeurs mobilières a nui au trafic normal et, par voie de
conséquence, à l’industrie. Mais, à côté des faillites des ban-
quiers prêteurs des princes il nous manque une liste des fail-
lites des commerçants. Nous sentons seulement, d’une façon
assez vague, que le grand essor commercial des années 1540-
1550 est passé, de même que s’atténue, pour toute la fin du
xvr et le début du xvr® siècle, l’essor du crédit. La période
qui s’ouvre est, du moins pour les pays qui avaient d'abord
joué le premier rôle, une période de décadence économique.
Les événements politiques précipitent- cette décadence,
L'Espagne, tout en conservant une part de sa prépondérance,
est incapable de restaurer son économie, Gérard de Malynes,
au début du siècle suivant. a fort bien décrit ce processus de
ruine (2) :
Et en ces dernières années les Florentins et autres ont traité
avec Philippe I, roi d’Espagne, durant ses guerres avec la France
et les Pays-Bas. l’entraînant à engager les revenus de ses posses-
(1) K. Hæprer, p. 133.
(2) A Canker.…, p. 27.