20 LES ORIGINES HISTORIQUES DES PROBLÈMES ÉCONOMIQUES
pensable condiment et aussi le désir, lorsqu’ils se sentaient
les plus forts, d’aller s’en emparer par la violence. Tel, de
nos jours, un pays à qui les maîtres des matières refusent
ces produits de première nécessité, le fer, la houille, les
céréales.
Ce qui est nouveau, par conséquent, ce n’est pas la possi-
bilité, le danger d’une guerre pour la conquête des matières
premières. Ce qui est nouveau, ce qui change, ce sont les
matières à propos desquelles la guerre peut éclater.
Encore est-il certaines de ces matières, comme la houille,
dont le rôle commercial et même le rôle politique sont plus
anciens qu’on n’est d'ordinaire porté à l’admettre. De très
bonne heure, st surtout depuis le xv° siècle, le charbon de
Newcastle devient un objet important de consommation sur le
marché de Londres. Le transport de cette marchandise pondé-
reuse donne lieu à un mouvement maritime assez actif pour
qu’on l’appelle à Londres du nom, assez bizarre à nos oreilles,
de « charbon de mer », sea coal. Vers 1615 ne disait-on pas
que ce trafic occupait annuellement 400 navires dont la moitié
ravitaillait Londres, tandis que les navires hanséatiques s’occu-
paient de la Flandre, et qu’une flotte française d’une cinquan-
taine de voiles venait chercher la houille dans l’estuaire de
la Tyne?
Après avoir été en grande’ pârtie aux mains des étran-
gers, ce commerce avait été réglementé, depuis 1600, par
la création de la compagnie des Hosimen. Non seulement
ce contrôle favorisa l’enrichissement des classes mar-
chandes, mais ilmit entre les mains de l’Etat une arme des
plus utiles. Dans l’histoire si compliquée des relations entre
l’Angleterre et les Provinces-Unies, nous voyons que la per-
mission et l’interdiction d’exporter le charbon anglais ont
servi de moyen de pression sur la politique néerlandaise, —
exactement comme elles pourraient servir la politique an-
glaise ou américaine à l’égard de l'Italie d’aujourd’hui (').
(t) C’est à mon éminent coliègue de l’Université de Londres,
M. R.-H. Tawney. que je dois d’avoir eu mon atlention arrêtée sur cé
rôla du charbon dans les relations anglo-néerlandaises.