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LE CAPITALISME COMMERCIAL ET BANCAIRE
L’une des caractéristiques de notre âge, c'est le rôle joué
par le crédit. Il n’est pas possible de concevoir J’activité d’une
industrie ou d’une entreprise commerciale sans faire entrer
en ligne de compte les banques qui les ont financées. La
création des sociétés anonymes, la diffusion entre des milliers
de mains des actions et des obligations ont rendu cette no-
tion familière à tous les esprits. Sous cette forme, elle est
une chose nouvelle, que nous pourrons dater du premier
quart ou du premier tiers du xIx° siècle, à peu près contem-
poraine à ses débuts de la railway mania ; elle ne prend vrai-
ment son essor qu’à l’époque du second: Empire.
Mais remontons à l’essence même du phénomène : au lieu
de vendre les produits de son travail et d’attendre qu’il ait
encaissé le prix de ses ventes pour racheter des matières pre-
mières, le producteur escompte ses rentrées futures ; pour ce
faire, il s'adresse aux détenteurs des richesses actuelles, aux
manieurs d'argent, lesquels à leur tour travaillent avec des
fonds prêtés par autrui. « Dettes, dit Rabelais, sont un entre-
tenement unique de l'humain lignage, l'âme qui toutes
choses vivifie… Figurez-vous notre microcosme en tous ses
membres, prêtans, empruntans, devans… Car nature n’a
sréé l’homme que pour prêter et emprunter. »
Ainsi réduit à ses éléments essentiels, le phénomène est an-
cien. Dès que les ports de la Méditerranée inaugurent les opé-
rations de commerce à grande distance, le transport des
marchandises aux Echelles du Levant, ils ont recours au prêt,
à la commandite. Dès lors apparaissent, avec la lettre de
change, les banques. Dès lors, aux foires de Champagne,
s’opèrent les paiements par compensation, ancêtres du mo-