330 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
féodal, après une lutte qui leur avait un moment valu
l’obtention d’une certaine autonomie locale sous des chefs
élus (démogerontes, épitropes, proestes, phylarques), ainsi
que la conservation des biens communaux. Au xITI® siècle,
la masse des populations rurales de l’Empire romain
d’Orient est réduite à la condition des vilains (motèles)
qui conservent leur liberté personnelle sous la dépendance
des archontes, ou pire encore, à celle des serfs (paroikoi)
fixés au domaine, tenus de payer au Propriétaire l’impôt
foncier (canon), le tiers de la récolte (décime), le tiers de
leur succession, et de lui fournir deux jours de travail
(corvées) par semaine, sans préjudice du service militaire,
de la capitation et des géquisitions écrasantes, auxquelles
l’État les astreint. Au moment même où les vilains d’Occi-
dent s’élèvent à la liberté et au bien-être, ceux de l’Orient
tombent dans l’abîme de la servitude et de la misère ; ils
forment ces mornes troupeaux que tant de dominations
successives vont laisser indifférents.
Tant que le pouvoir central resta assez fort, c’est-à-dire
au XII° siècle, cette régressiqn sociale eut peu d’influence
sur la production agricole qui demeura abondante. L’éle-
vage, les cultures des céréales, de la vigne, des arbres frui-
tiers, des plantes industrielles furent florissantes pendant
une centaine d’années. Les voyageurs, tels qu’Edrisi et
Benjamin de Tudela, vantent encore l’abondance de la
Romanie « en toutes sortes de denrées ». Mais la Pros-
périté des campagnes ne survéeut pas aux troubles qui
suivirent la fin de la dynastie des Commène et aux guerres
qui mirent l’Empire aux prises avec les Latins, les Bul-
gares et les Tures. Au xmr° siècle, l’État, qui avait été
an objet d’envie pour l’Occident, est devenu pour ses
rivaux un objet de mépris et de pitié, et son sol ne peut
plus suffire aux besoins d’une population pourtant décimée.
La décadence de la bourgeoisie et de l’économie urbaine
an Orient. — Il avait encore au siècle précédent une bour-