Full text: Le travail dans l'Europe chrétienne au moyen âge (Ve-XVe siècles)

CONQUÊTES DU TRAVAIL AU MOYEN AGE 417 
des campagnes équivaut à celle des villes. Mais dans la 
majeure part de l’Europe, l’horizon s’est assombri et le 
monde du travail vit dans l’inquiétude, à la veille des nou- 
velles épreuves qui, aux temps modernes, vont retarder 
son ascension. 
L’œuvre accomplie par la civilisation médiévale est 
pourtant restée presque intacte dans ses grandes lignes. 
Pendant ce millénaire, les deux tiers de l’Europe ont été 
conquis par la colonisation ; la po pulation a doublé; la pro- 
duction agricole s’est accrue dans de vastes proportions; la 
propriété individuelle, sous ses diverses formes, a rémplacé 
le système primitif de la propriété de tribu, de village ou de 
famille. Les classes bourgeoises et rurales elles-mêmes ont 
accédé à la possession du capital foncier. La richesse mobi - 
lière, par suite de l’essor du commerce et de la production 
industrielle, à pris un développement nouveau et s’est 
disséminée en une foule de mains. Mais le fait capital qui 
s’est produit et qui donne.à cette ère une importance inou- 
bliable est l’avènement des classes urbaines et rurales à 
la liberté. 
Pour la première fois, les multitudes, cessant d’être 
des troupeaux sans droits et sans pensée, sont’ deve- 
nues des associations d’hommes libres, fiers de leur indé- 
pendance, conscients de la valeur et de la dignité de 
leur travail, aptes à collaborer par leur activité intelligente 
dans tous les domaines, politique, économique et social, 
aux tâches que les aristocraties se croyaient seules capables 
de remplir. Non seulement par elles, la puissance du tra- 
vail a été centuplée, mais encore la société a été régénérée 
par l’afflux incessant d’un sang jeune et vigoureux. La 
sélection sociale a été désormais mieux assurée. Les 
nations ont pris, grâce au dévouement et à l’esprit de 
sacrifice de ces foules médiévales, conscience d’elles-mêmes. 
Ces foules ont fait triompher la cause des grandes patries 
après celles des pétites ; c’est le martyre d’une paysanne 
des marches de Lorraine qui a sauvé la première de toutes, 
BoIssoNNADE. 27
	        
Waiting...

Note to user

Dear user,

In response to current developments in the web technology used by the Goobi viewer, the software no longer supports your browser.

Please use one of the following browsers to display this page correctly.

Thank you.