JOURNAL DES ÉCONOMISTES
mique, considérée en soi, est cyclique et a, en outre, pour effet d’ac-
croître la cyclicité de la vie économique nationale, plutôt que de la
diminuer. Même dans les pays qui appartiennent au premier groupe,
la politique économique peut ne pas être exempte d’une tendance
cyclique, particulièrement dans la dernière période où la vie écono-
mique poursuit un mouvement cyclique, car la politique écono-
mique ne peut pas éviter de se laisser façonner par la marche
effective de la vie réelle.
Si nous réduisons notre objectif à l’examen de la politique éco-
nomique des pays du second groupe, nous trouvons que cette
cyclicité a sa cause principale dans le fait que la politique écono-
miique ne conduit pas mais est conduite.
Le conducteur, ici, n’est pas la politique économique, mais la
vie, et la vie avec ses erreurs les plus diverses, La vie est toujours
pleine d’erreurs, que la politique économique doit se donner pour
tâche d’écarter. Mais dans les pays qui appartiennent au second
groupe, on est forcé de retourner la proposition. Il n’est pas besoin
de songer à écarter ici des erreurs. Bien au contraire, la politique
économique est écartée par les erreurs. Je crois pouvoir parler
d’une cyclicité d'erreurs, en ce sens que la même erreur se répète
avec une certaine régularité. Une erreur est dépassée par une autre,
celle-ci, à son tour, par une troisième et finalement, après des
années, la première erreur revient sur le marché.
L'histoire de la politique économique se présente donc dans ces
pays comme une chaîne sans fin d’erreurs qui, malgré l’addition
de nouvelles erreurs, ne cessent au fond de se répéter.
La cyclicité de la vie économique, qui est surtout devenue claîre-
ment perceptible dans les premières années du dix-neuvième siè-
cle, est, par conséquent, une cause dont témoigne l’insécurité de
notre vie sociale, sur laquelle notre vieux maître a, en son temps,
attiré l'attention, dans une analyse magistrale de ses Causes de la
misère sociale actuelle !. L'insécurité est poussée à l’extrême par
l’inconstance née de la cyclicité. Ce n’est que dans les pays où
domine une politique économique bien réglée que cette inconstance
peut être, dans une certaine mesure, tempérée. Mais dans les pays
où la politique économique est elle-même cyclique et s’abandonne
en outre à la domination des mouvements cycliques de la vie éco-
nomique réelle, cette inconstance est encore aggravée.
L’école à prioriste de l’économie politique, si on me permet de
l’appeler ainsi, attribue purement et simplement comme but à la
1. Lujo Brentano, Ursachen der heutigen sozialen Not. 2° éd, Leipzig, 1889.