L'ÉVOLUTION JAPONAISE DANS SES RAPPORTS AVEC L'ÉTRANGER 17
une puissance renforcée. La rébellion fut bientôt étouffée, et avec
elle disparurent les heures sombres. Les années qui suivirent 1877
bénéficièrent d’une nouvelle prospérité économique, et en 1880
monta subitement le flot croissant de la conjoncture économique.
La guerre, bien qu’elle fût alors un événement intérieur, eut à
peu près les mêmes effets que les événements qui avaient marqué
le début du Nouveau Régime, et elle trouva son analogie dans les
deux guerres extérieures de 1894-1895, contre la Chine, et de 1904-
1905 contre la Russie, notamment en ce qui concerne ses consé-
quences favorables pour la vie économique. C’est ainsi que la guerre,
elle aussi, est devenue un événement que l’on doit mettre au
compte des influences étrangères.
La guerre de 1877 a créé le second fondement de l’absurde opti-
misme général, à savoir : que si une guerre est un mal tant qu’elle
dure, elle entraîne cependant après sa fin une conjoncture écono-
mique favorable, c’est pourquoi on doit la saluer, elle aussi, comme
la bienvenue.
C’est à ce préjugé que l’on est redevable des épreuves amères que
le Japon eut à traverser après la Grande Guerre, dans la période
qui a commencé en 1920. Et éependant jusque-là on n’a pas voulu
le reconnaître.
Ce qui confère à ce second événement son caractère optimiste
au point de vue économique, c’est précisément le même phéno-
mène observé au début du Nouveau Régime, c’est-à-dire l’infla-
tion du papier-monnaie. Ce sont les chiffons de papier qui permi-
rent de mener, et finalement de gagner la guerre contre Saigo, de
même qu’ils avaient assuré au Nouveau Régime un pouvoir sûr.
Le pouvoir nouveau avait été acquis avec du papier; le plus grand
danger qui pouvait le menacer du fait de Saigo fut également
écarté avec du papier, et celte victoire constitua un énorme ren-
forcement du pouvoir nouveau. On pourrait presque dire que la
puissance du Nouveau Régime est l’enfant du papier monnaie. Par
là s'explique parfaitement que les nouveaux dirigeants de l’Etat,
tout comme le peuple gouverné par eux, aient professé pour le
papier-monnaie, la plus grande vénération.
Ce culte du papier monnaie aurait encore duré assez longtemps
et aurait provoqué beaucoup plus de maux si nous n’avions pas eu
Matsukata, le plus grand et presque le seul vrai financier du Japon
moderne. Sous ce rapport, on peut dire avec une calme assurance
que le plus grand bienfaiteur du Japon actuel n’est ni Tto ni Inouye,
encore moins Okuma (qui a parfois commis en matière financière et
économique les plus crandes fautes), mais Matsvkata.