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LES DÉPENSES DE GUERRE DE LA FRANCE
quatre années et trois mois de guerre, la fin a été amenée non point par
l’épuisement financier de l’un des belligérants, mais par la supériorité
des armes, des effectifs, du commandement. Les gouvernements avaient
trouvé, dans l’émission de papier monnaie, le moyen de prélever emp1-
riquement, sur la fortune des particuliers, toutes les ressources néces-
saires.
Toutefois, dans son livre, The Economic Consequences of the Peace (1),
le professeur Keynes écrit : « Sans l’assistance financière des États-Unis,
les alliés n’auraient jamais gagné la guerre. » La période la plus critique,
au point de vue financier, fut le semestre qui précéda l’entrée des États-
Unis dans la guerre ; par conséquent, depuis la fin de l’été de 1916
jusqu’au mois d’avril 1917. »
Si les dépenses de guerre sont formidables, les sorties de caisse ont été
encore plus importantes. En effet, le bouleversement économique causé
par la guerre a entraîné fatalement la constitution de services publics
nouveaux : en particulier, les services du ravitaillement de la population
civile (blé, sucre, viande, etc.) ; l’État est devenu un acheteur unique
sur tous les marchés du monde, pour revendre à la population civile.
Il a été ainsi amené à faire des avances de fonds qui se chiffrent par
milliards. Sans doute, ces avances ont été suivies de remboursements
au fur et à mesure des reventes. Mais les sorties de fonds ont nécessité
le recours à des moyens de trésorerie (emprunts à court terme, papier-
monnaie) pour y faire face.
Il est de la plus haute importance de dégager, comme enseignement
général de la guerre pour la théorie des finances publiques, les principales
causes de l’énormité des dépenses de guerre, en France. Il y a là une
théorie générale qui sera applicable aux grandes guerres nationales de
l’avenir.
Ces causes ont été multiples. Voici les principales :
19 Le caractère industriel de la guerre de 1914 ;
20 Les prêts aux alliés ;
3° Le développement ou la création de services d’assistance sociale ;
49 et 5° La hausse des prix amenée par les conditions économiques
et financières dans lesquelles la guerre a été faite :
69 Le gaspillage inévitable que la guerre a entraîné ;
79 La suppression ou l’affaiblissement du contrôle ;
89 La spéculation des profiteurs de la guerre ;
90 Le développement de la dette publique.
Il y a certainement eu d’autres causes ; bien qu’elles aient eu une
grande influence, ce ne furent pas les principales.
(1) MacmirraN, Londres 1920, p. 256, texte et note 1.