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part, il n’a aucun moyen d’obliger les détenteurs privés du seul
instrument monétaire actuellement existant, de traiter raisonnable-
ment pour leur or. Il en est autrement avec une monnaie internationale,
Au sortir de la féodalité, règne du morcellement, où tout petit
prince avait le droit de battre monnaie à sa guise, ce droit est devenu
régalien, il est passé dans les attributions de l’État. La situation
actuelle est caractérisée par le morcellement que présentent les États
par rapport à l’unité économique du monde. Pour sortir de l'anarchie
qui en résulte, le droit de monnaie, cessant d’être « régalien », doit
désormais être référé à la Communauté coopérative des nations, et
la fonction monétaire, comme la Poste, comme l’Hygiène, comme la
Sécurité, devenir un service public international.
5° La monnaie a pour fonction de mesurer les valeurs économiques
et de servir d’instrument aux échanges. À ces deux fonctions essen-
tielles sont venues s'ajouter deux fonctions parasitaires : servir de
moyen de crédit aux États et fournir une matière à la spéculation.
La combinaison de ces quatre fonctions a provoqué une embrouille
et un trouble extraordinaires.
Or, la monnaie devenue essentiellement instable ne mesure plus
rien; la crise provoquée par son fait entrave et limite les échanges
qu’elle devrait faciliter; les embarras financiers des Gouvernements
ne font que croître quand ils ont eu recours abusivement à l'instru-
ment monéraire. En conséquence, la seule fonction monétaire encore
efficiente est celle de la spéculation et les intérêts de celle-ci s'avèrent
manifestement en contradiction avec ceux des trois autres fonctions,
‘elle étant la situation, on cherche le remède. Il y a des palliatifs, des
médications empiriques. Il y a aussi une solution radicale : liquider
le régime actuel et instaurer un régime monétaire nouveau où la mon-
naie soit affectée exclusivement à la mesure et au paiement; à cette
fin, s’élever contre le change au point de le supprimer purement et
simplement. Pour cela, internationaliser la monnaie, lui donner un
fondement soustrait à toute fluctuation; en même temps procurer
aux Gouvernements un moyen de crédit nouveau et… prier la spécu-
lation stérile de porter son action nocive en un domaine moins dan-
gereux, en la dominant non pas à coup de lois et de décrets, mais
simplement en supprimant, faute d'objet, les écarts dans les changes.
L’exposé qui va suivre a pour but d'examiner les faits actuels en
se plaçant au point de vue d’une telle réforme. Le problème est d’une
complexité extrême. Aucune solution ne saurait être adéquate si tous
les termes n’en sont posés, pesés et placés constamment à la vue.
Une analyse donc, une analyse intégrale est nécessaire, mais une syn-
thèse aussi, car la solution à intervenir, quelle soit-elle, ne saurait
plus satisfaire si, à l'exemple de ce qui a été fait pendant les sept années
d’après guerre, elle demeure fragmentaire et partielle.