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II. — L’EXPOSÉ DES FAITS
Il importe d’abord d’être bien d’accord sur certains faits et postulats,
fondamentaux : les maux provoqués par la crise actuelle, les caracté-
ristiques du milieu économique au sein duquel se développe le phéno-
mène monétaire, les tendances qui entraînent ce milieu tout entier
vers un état nouveau en vertu du seul déterminisme des causes.
A. Les maux monétaires.
1° Dans les pays à inflation, la hausse des prix frappant lourdement
les consommateurs sans compensation pour ceux dont le revenu ne
peut s'adapter. Dans les pays à change élevé, au contraire, la baisse
des prix, vu l’impossibilité d'exporter;
2° l'impossibilité économique, pour débiteurs ou créditeurs,
d'établir un bilan par suite de l’impossibilité de chiffrer la valeur
réelle des créances;
3° La paralysie du sain esprit d'entreprise, aucune prévision ne
pouvant être établie quant au rendement futur probable du capital
à investir en constructions, usines ou travaux publics. De là le chômage
total ou partiel ou encore le mésemploi des capitaux;
4° L’épargne rendue impossible par suite des crises ou rendue incer-
taine dans son efficacité future. Il suffit par exemple de comparer
en Belgique le cours des fonds de l’État et des emprunts de ville;
5° L'esprit de spéculation substitué à l’esprit d’entreprise et à
l’esprit d'épargne. Toutes les classes de la société forcées de suivre
les cotations de la Bourse, d’acheter et de revendre des valeurs, au
comptant ou même à terme, de spéculer sur les marchandises en
pleine ignorance de leurs quantités;
6° Le « dumping » que l’on a tant reproché aux Allemands pendant
la guerre devenu régime forcé. La Fédération des industriels britan-
niques s’adressant à M. Churchil en mai 1926 le dit explicitement :
« La dépréciation du franc fait un grand tort à nos produits non seu-
lement en France, mais sur les autres marchés européens, car elle
facilite la vente des produits français au détriment des nôtres. »
Le désordre économique causé par la répercussion de la crise moné-
taire et de la crise des changes, a pu être représenté par des chiffres.
Pour 1921 les prix de transport des marchandises se sont échelonnés
de 34 (Hongrie) à 215 (Belgique) et 275 (Suède). Les prix de transport
pour les voyageurs de 8 (Autriche) à 84 (Belgique) et 248 (Suède).
Les coûts de la vie vont de 41 (Pologne) à 180 (États-Unis). Qu'on
s’imagine les bouleversements d’un marché international par la
concurrence entre produits réalisée dans des conditions de prix de
revient aussi extraordinairement différentes (1).
(1) Bureau international du Travail : Enquête sur la production, t. V, p. 1585.