Full text: La politique coloniale de la France

10 LES INITIATEURS ET LEURS AUXILIAIRES. RICHELIEU 
situation ne soit pas liée à leur propre sort, qui aient une 
délégation directe de l’État, les stabilisant, pour ainsi dire. 
à l’abri de tous les risques inséparables des changements 
de personnes. Il y avait là des idées nouvelles à dégager 
et que, comme on le verra plus loin, seul l’intérêt pu- 
blie, d’accord du reste avec des intérêts privés, devait im- 
poser. 
A l’époque où nous sommes, Richelieu, Bouthillier, Le 
Beauclerc, ont leurs familiers, ou, dans le sens que le mot 
recevait alors, leurs « domestiques », dont ils font. leurs 
secrétaires, leurs agents, avoués, inavoués, et, au besoin, 
désavoués. Ils les choisissent, les utilisent et les rempla- 
cent comme ils le veulent; ils les cassent aux gages quand 
il le faut. Richelieu donna l’exemple, lui qui, durant toute 
sa vie publique, eut comme une hantise de la trahison. À 
côté du Père Joseph du Tremblay, dont il fit une sorte de 
coadjuteur politique et dont le rôle est demeuré souvent 
assez énigmatique, on le vit employer des personnages 
suspects, toujours prêts à passer dans le camp de ses ad- 
versaires s’ils y trouvaient intérêt. Au hasard on peut citer 
le nom de Deageant!, ou de Fancan?, tous deux maîtres 
en intrigues compliquées, et qu’il finit par emprisonner l’un 
et l’autre à la Bastille, après les avoir chargés de missions 
délicates et plus ou moins officielles. Parfois, leur passé 
même devrait étre un avertissement, mais il ne s’y arrête 
pas : tel, le cas de ce Cotignon, dont il s'assure le concours, 
après l’avoir vu servir, et desservir, Marie de Médicis, et 
que l’on rencontre un beau jour qualifié d’un titre alors un 
peu vague, mais impliquant d’abord la confiance, celui de 
« secrétaire du roi* ». 
Le moins que l’on puisse penser de collaborateurs ainsi 
recrutés, c’est que le choix en est hasardeux, lorsqu’il n’est 
pas trop habilement calculé. À côté d'unités douteuses, il 
est vrai, on trouve fort heureusement des hommes d’un dé- 
vouement éprouvé, Cherre, Charpentier, que l’on voit cons- 
i. Ct. Mémoires du Cardinal de Richelieu, op. cit t. VI, p. 13, note 2 
2. Cf. Gabriel Hanotaux, op. cit, t. Il, p. 465. ' 
3, Mémoires de Richelieu, édition Petitot, Paris, 1823, t. VI, p. 115.
	        
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