LES INITIATEURS ET LEURS AUXILIAIRES. RICHELIEU 11
tamment dans le sillage du cardinal, ou encore Lucas, qui,
avec des origines modestes, s’éleva peu à peu jusqu’à de-
venir « secrétaire de la main » du roi !. On a parfois com-
paré ce personnel à celui d’une grande étude de notaire.
Ce n’est pas complètement exact, mais il y a des similitu-
des. Quand la maison change de maître, si celui qui vient
tenir la place garde quelqu’un de ceux qu’on lui présente,
c’est toujours par grâce qu’il le fait. On pourrait en citer
des exemples. On voit ainsi Cotignon, que Potier d’Oc-
querre employait en qualité de premier commis, offrir ses
services, à la mort de ce dernier, en 1628, à Bouthillier de
Pons, qui allait le remplacer comme secrétaire d’État, et
diriger la marine du Ponant. Celui-ci les accepte, mais
parce qu'il croit conforme à son avantage personnel de ne
pas les refuser : « Il (le sieur Cotignon) est bon homme et
franc, écrit-il au cardinal; il sait fort bien tout ce qui est
du formulaire et de la routine de la charge et ne manque
pas, je crois, de quelque lumière? ».
À ces réserves dans l'éloge, où perce un peu le dédain
d’un grand seigneur, il apparaît que les subalternes ne
devaient guère attendre du maître de la maison des louanges
admiratives ni même de simples garanties pour leur avenir.
Richelieu et les secrétaires d’État qui l’assistaient, d’ail-
leurs en sous-ordre, n’avaient pas de bureaux, tels que
nous en constatons aujourd’hui l’existence, le fonetionne-
ment régulier, et l’adaptation à des objets déterminés. Le
personnel qu’ils employaient n’était pas spécialisé, selon
les convenances ou la compétence acquise de chacun; 1]
recevait au contraire des affectations aussi variées que
les affaires mêmes dont les ministres avaient à prendre
souci. Or ceux-ci, comme on l’a vu, s’oceupaient du Ponant
ou du Levant. en sus de bien d’autres choses qu’ils ne
1. Fils d'un mercier de Loudun, il devint premier commis de Beaulieu-
Ruzé, puis de Lomenie, comte de Brienne, qui remplaça comme secrétaire
d'Etat, pour la marine du Ponant, Bouthillier de Chavigny. Il fut aussi
quelque temps secrétaire d'Anne d'Autriche; il obtint pour son fils Michel
la survivance de sa charge. — Mémoires du Cardinal de Richelieu, publiés
pour la Société de l'Histoire de France, t. VI, p. 100, note 7.
2, Cf G. Dagnaud, op. cit, p. 8.— Cf. également pour cette période :
Caillet. Histoire de l’Administration en France sous. Richelieu.