20 LES INITIATEURS ET LEURS AUXILIAIRES. RICHELIEU
dès cette époque où les distinctions de classes pouvaient
marcher de pair avec une prétendue supériorité de race,
le gouvernement de la France entendait proscrire ou
brimer. Dans l’Amérique du Nord, les représentants de
l'autorité, à peine établis, ne négligèrent rien pour se con-
cilier les Indiens, et réussirent très vite à s'assurer parmi
eux des sympathies durables. Ainsi se manifestait déjà
toute la politique indigène de la France, à la fois tolérante
et éducatrice, telle qu’on la rencontrerait plus tard, le plus
souvent avec succès, en Afrique et en Asie. Les moyens
pourront différer, l’idéal ne variera pas.
Les Français du xviI° siècle, chez lesquels les luttes
religieuses, toujours prêtes à se rouvrir, avaient excité
l’ardeur de la foi, n’ont pas hésité. Le premier terme d’une
évolution sociale, où des populations indigènes pourraient
s'élever à un stade supérieur de civilisation, ils l’ont vu
dans l’accession à la religion chrétienne. Ils se sont fait un
devoir, non seulement envers les Indiens de l’Amérique
du Nord et des Antilles, mais même à l'égard des noirs
importés d’Afrique, de ne pas limiter, de ne pas rétrécir
l’action civilisatrice de la France, en se bornant à consi-
dérer l’intérêt commercial. On a fait appel au prosélytisme
catholique pour assurer la conversion des « sauvages », et
l’apostolat commencé ne s'arrête plus, malgré tous les
obstacles qu'il rencontre et les martyrs qu’il laisse sur la
route. Jamais zèle religieux ne fut plus grand que vers ce
milieu du xvn® siècle. Récollets, Ursulines, Jésuites,
renouvellent et multiplient sans cesse leurs établissements.
A partir de 1640, ce sont les Sulpiciens que l’on voit, au
Canada, redoubler d’efforts!, le foyer principal de leur
action étant à Montréal. Toutes ces compagnies religieuses,
pour se recruter et trouver des ressources nouvelles,
restent en relations constantes avec la France. Elles cher-
shent. et elles trouvent aisément alors. dans les milieux
4. Cf. Père de Charlevoix; Histoire de la Nouvelle France, Paris, 1744,
et le remarquable ouvrage de M. Goyau sur les Origines religieuses du
Canada.
Cf. également, Vie de M. Ollier, Paris, Poussielgue-Rusand, et Le Mans
Eh. Richelet, 1841, t. IL, p. 431 et suivantes.