Le commerce français à Madagascar au XVII e siècle.
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des capitaines *), auxquels un autre but commercial avait été as
signé, en France même, par les négociants et les armateurs qui
les avaient fait partir.
Toutefois, les facilités de tout genre trouvées par les marins
français à la baie de Saint-Augustin, la situation et la sûreté de
ce mouillage avaient dès lors frappé les esprits observateurs. Non
content de déclarer, dans la relation qu’a publiée Thévenot,
que c’«est un lieu bien propre pour se rafraîchir des fatigues
de la mer, et qui ne serviroit [pas] moins que Mozambique aux
Portugais [à] qui auroit un traffic affermy ou envie de raffermir
dans les Indes» 2 ), Augustin de Beaulieu a fait en 1631 ou 1632, dans
un curieux mémoire dont il subsiste quelques fragments, un
véritable éloge de la baie de Saint-Augustin; une seule réserve,
relative à l’absence de «marchandises desquelles on peut esperer
proffit qui vaille la peine d’en parler», vient mettre une ombre
au tableau, mais ne semble pas suffisante à Augustin de Beaulieu
pour devoir empêcher de fonder en cet endroit, «ou en quelque
autre lieu plus propre de la mesme bande», un établissement
français dont l’objet ne sera pas tant de faire le commerce avec
les habitants de l’île même de Saint-Laurent que, «quand on y
seroit estably», d’«entreprendre sur quelque lieu que ce soit des
Indes Orientales, soit en guerre ou en trafic» a ).
il convient sans doute de chercher dans cette pénurie d’objets
d’échange un des motifs pour lesquels, au cours des années sui
vantes, la baie de Saint-Augustin fut délaissée par nos marins; mais
on aurait grand tort de ne pas faire entrer en ligne de compte
1) De là l’entente entre les deux navires français et le navire hollandais le
Het Scliaap, — le Bélier (A. et G. Grandit» 1ER, Collection des Ouvrages anciens
concernant Madagascar, t. 1, p. 320), — qui relâchèrent en même temps
à la baie de Saint-Augustin en 1602, et la mise en commun de tous les vivres
qu’on pourrait se procurer ( Voyage de François Pyrard de Laval, éd. de 1615,
t. 1, p. 52—53); de là ahssi la phrase d’Augustin de Beaulieu à propos
des bœufs: «A quelque prix que ce soit, [il] convient que j’en aye quelques
uns» (Mémoires du voyage aux Indes Orientales, p. 17).
2) Mémoires du voyage des Indes Orientales, p. 21.
8) Bib. Nat.., mss. Fr. 4826, fol. 39—40. — M. de la Roncière a daté
ce mémoire, de manière absolument indiscutable, dans son récent travail sur
les routes de l’Inde au début du XVII* siècle (72. des Questions Hist., 1 er juillet
1904, t. LXXVI, note 6 de la p. 202).