tique et détermina la fermeture des ateliers et des petites fa- briques où l’ouvrier était à la fois patron et artiste. C’est alors que naquirent les grandes usines, avec leurs machines bruyan- tes et la masse fourmillante de leurs ouvriers, qui jetèrent sur le marché d’énormes quantités de produits non pas plus finement travaillés qu’auparavant, mais coûtant infiniment moins. Dans ces grandes entreprises, il fallait des cerveaux organisateurs et directeurs, de grands capitaux d’installa- tion, de forts capitaux d’exploitation. La physionomie de l’entrepreneur et du capitaliste se détacha nettement de celle du travailleur. L’entrepreneur, avec ses propres capitaux, mais plus souvent avec les capitaux d’autrui, organisa la production, et ce travail, lourd de préoccupations, de respon- sabilités et de difficultés l’absorba entièrement. Autour de lui se groupa une foule de*techniciens, d’employés, d'ouvriers manuels. A mesure que les entreprises et la production s’accroissaient vertigineusement, la demande de main-d’œu- vre devint énorme et de toutes parts les ouvriers accoururent, alléchés par les commodités de l’existence des villes et par le mirage d’un salaire fixe et d’une plus grande liberté. Les campagnes se dépeuplèrent, et le phénomène de l’urbanisme se manifesta. Mais dans quelles conditions différentes se trouvèrent les nouveaux ouvriers de la grande industrie, en comparaison des artisans des siècles passés ! L'introduction des machines et du principe de la division du travail, poussé jusqu’à l’extré- me, rendit mécanique et monotone le travail de l’ouvrier manuel. Il perdit le goût de la production, qui à l’époque de l’artisanat, égayait le travail. Enfermé dans de grands établissements, il répétait désormais des centaines et des milliers de fois le même geste devenu automatique; son esprit S’éloigna de plus en plus de la vision d’ensemble de l’œuvre à produire, et le travail ne fut plus pour lui que pure fatigue, simple moyen de subsistance matérielle. Il était naturel que, dans ces conditions, la psychologie de l’ouvrier changeât profondément. Tandis que le travail devenait pour lui uniquement un sacrifice, la rémunération matérielle qu’il en tirait restait fort maigre et tendait plutôt à diminuer qu’à augmenter. La première partie du xuxème siècle fut caractérisée, en effet, par une offre énorme de main-d'œuvre, déterminée par l’exode vers les villes de grandes masses de paysans désireux d’abandonner le dur labeur A1