74 LE TRAVAIL PENDANT LE HAUT MOYEN AGE Dans un État devenu plus stable et plus pacifique, cette population agricole, qui ne connaissait guère de villes, se développa au point que la Serbie-Croatie du x° siècle compta 2 millions d’habitants. Influence de Byzance sur les Bulgares. — D’autres populations durent à Byzance leur accession à la vie civi- tisée. Ce furent en Mésie, les Bulgares, Touraniens féroces et frustes venus des plaines russo-asiatiques sur les deux rives du Danube au cours du vrr siècle (659), convertis par Byzance (864-65) et slavisés avec une extrême rapi- dité, au point qu’ils adoptèrent la langue serbe. Ces hideux ravageurs se transformèrent, comme les Slaves, sous l’ac- tion des Byzantins. On les vit renoncer à leur turban et à leurs étendards à queue de cheval, à leurs petits chefs de guerre, pour adopterle costumeetlesinstitutions byzantines. Ils fondèrent une monarchie despotique, dont le prince (khagan) se proclama tsar ou knèze, et au début du x° siècle, fonda dans les Balkans, ainsi qu’au delà du Danube, un empire où il se posa en rival de Basileus, si bien que ce dernier dut se résoudre à le détruire après ‘une lutte acharnée. Il eut à Preslav sur le grand fleuve une capitale où il singea grossièrement le luxe de la cour byzantine. Son aristocratie de boliades et de boîars, noblesse de fonc- tionnaires et de grands propriétaires, comme celle de Byzance, s’allia aux familles byzantines et reçut une édu- cation grecque, de même que son clergé forma une Église indépendante (autocéphale) de rite grec, qui obtint une bonne part de la richesse foncière. Les colons romains furent asservis en majorité. Sous ce gouvernement à la grecque, la prospérité agricole fut très grande. Une rela- tion du x° siècle atteste que cette Bulgarie hellénisée «abondait de tous biens », spécialement de blés, de bétail, de sel, et que la population y avait pullulé (multitudo magna et populus multus), bien qu’il n’y eût pas de villes. Les Bulgares, dont Byzance raillait la rusticité, s’enri-