PRÉFACE. IX voulait avoir des colonies et négligeait d’avoir une ma rine, il se livrerait au plus effroyable des gaspillages. Au gaspillage de l’argent, il ajouterait le gaspillage du sang. C’est pourtant ce qui est arrivé à la France. Pen dant qu’elle acquérait des colonies, elle laissait dépérir sa marine. Pendant qu’on plantait son drapeau sur de nouveaux territoires, son pavillon disparaissait peu à peu de toutes les mers. Seconde puissance maritime du monde il y a quarante ans encore, elle tombait bientôt aux derniers rangs. Ses domaines coloniaux se multipliaient, le nombre de ses bâtiments marchands diminuait. De petits États, comme la Norvège et la Suède, passaient avant elle. Et elle donnait au monde le spectacle extraordinaire et inattendu d’une nation qui prétend dominer outre-mer et qui, dans le même temps, renonce à la pratique de la mer. Aucun pays de l’Europe, cependant, n’avait mieux été destiné par la nature à devenir ou à rester une grande puissance navale. La géographie l’avait, à ce point de vue, servie admirablement. L’énorme étendue de ses côtes, la multiplicité de ses ports, leur situation, leur grandeur, leur beauté, étaient faites pour l’inciter aux entreprises lointaines. Placée à l’extrémité de l’Eu rope, elle pouvait régner sur deux mers à la fois. La Méditerranée semblait devoir lui appartenir. Marseille la mettait en relation avec l’Orient : la Turquie, la Sy rie, la Grèce, l’Égypte, et, depuis l’ouverture du canal