LES INITIATEURS ET LEURS AUXILIAIRES. RICHELIEU 7
très haute idée de son devoir. Il était dans son plan géné-
ral, comme on l’a écrit!, de eombattre toute entreprise
de domination universelle, sans y opposer d’ailleurs des
ambitions semblables, mais en réclamant pour la France
la place qui lui revenait à juste titre.
Avec le but qu’il se proposait ainsi, le cardinal de’ Ri-
chelieu devait, — et ce fut en effet le principe de sa poli-
tique, — écarter une autorité trop forte pour ne pas
échapper à quelque forme de contrôle indépendant et mieux
concentrer tous les pouvoirs autour du roi, c’est-à-dire
d’abord en sa propre personne. Ce qu’il jugeait avant tout
funeste, c’était la dispersion de l’influence, l’émiettement
des efforts, et le désordre qui en était la conséquence.
Il était dans cet état d’esprit, quand, -ayant résolu de
développer la marine et de pratiquer une politique d’ex-
pansion commerciale, il avait, comme on vient de le voir,
fait abolir, en dehors de Tui du moins, la charge d’Amiral.
Il y avait eu quelque mérite, car il lui avait fallu s’atta-
quer à l’un des personnages importants de l’Etat, l’Amiral
de France. C'était alors le duc de Montmoreney, celui-là
même qui devait être décapité plus tard, et qui, dans
l’exercice de ses privilèges et prérogatives, avait une
sorte de prééminence sur tous ceux qui, comme lui,
avaient ou prenaient le titre d’Amiral. Il usait, « comme
bon lui semblait », des fonds de la marine, qui, pour
l’année 1622 et chacune des années suivantes, étaient
évalués « à un million d’or ? ». Cette charge était, pour
Montmorency, de telle importance, que, pour la lui retirer.
on convint avec lui de lui verser une indemnité de douze
cent mille livres, « somme qui bien qu’elle parût grande, non
seulement a été bien petite, mais d’un grand gain au
Roi pour les glorieux succès des années suivantes $ ».
1. Cf. Gabriel Hanotaux, Histoire du Cardinal de Richelieu, t IL, p.288.
— Cf. également Joannès Tramond. Manuet d'histoire maritime de ia
France, p.150 et suivantes. ; K ;
2. Mémoires du Cardinal de Richelieu, publiés par la Société de l'Histoire
de France, t, VI, p. 296, ;
3. Même suree t. VI, p. 297. Devenu surintendant général de la navi-
gation et du commerce, Richelieu fut amené, pour se fortifier dans la place,
à racheter les gouvernements du Havre. de Harfleur et de Montivilliers. à