LES INITIATEURS ET LEURS AUXILIAIRES, RICHELIEU 15
comme on l’a pensé*!, pour se concilier la Papauté, demeurée
favorable avant tout aux entreprises d’outre-mer des Espa-
gnols et des Portugais? N'est-ce pas simplement pour
s'attacher, en ces temps de foi ardente, avec le clergé et les
ordres religieux, tous ceux qui révaient de prosélytisme
catholique? ba-seconde-hypothèse”ést certainement la plus
vraisemblable. Ce qui même est sûr, c’est que, du premier
coup, alors que Richelieu ne dirigeait pas la politique du
royaume, l’apostolat avait marché de pair avec l’extension
de l’influence française, parmi les populations lointaines,
que l’on devait « appeler, faire instruire, provoquer et
esmouvoir à la cognoissance de Dieu et à la lumière de la
foy et religion chrétienne? ». L'œuvre avait été conçue de
telle sorte, en d’autres termes, qu’elle tendait à réunir dans
un faisceau commun d’intérêts tous les éléments de la.vie
nationale, en favorisant les aspirations morales du pays au
môment même où l'on développait son notivité mércantile.
Avec Richelieu cependant, bien des suppositions demeu-
rent possibles, quand il s’agit de pénétrer dans les arcanes
secrets de sa politique. En France méme, le cardinal devait
compter avec une partie de l’opinion catholique dont le
zèle s’accordait mal avec l’esprit de transaction et les demi-
mesures que, sur le terrain religieux, il favorisa souvent.
Bien que Richelieu n’eût pas, en effet, hésité, dans des cir-
constances mémorables, à combattre les huguenots, et que
le particularisme de leur organisation ou de leur influence
lui portât ombrage, il admettait fort bien qu’on leur laissät
une place dans l’État. Il ne songeait pas à la leur enlever
de vive force, en proscrivant du royaume la religion pré-
tendue réformée, comme on le ferait un demi-siècle plus
tard au nom de l’unité nationale. Or, cette forme de tolé-
rance apparaissait à beaucoup déjà comme une faiblesse
envers l’hérésie.
1. Cf. Louis Pauliat, op. cit, p. 40.
2. Cf. Commissions du Roy et de Mw l’'Admiral au sieur de Monts pour
l'habitation des terres de ?'Acadie, Canada, et auires endroits en la Nou-
velle-France. A Paris, par Philippe Paltisson, 1605. Exemplaire imprimé,
conservé dans les Archives du Ministère des Affaires étrangères, Amérique.
4. foi. 3-99.