40 LES CRIGINES HISTORIQUES DES PROBLÈMES ÉCONOMIQUES
lettres de change reçoivent la clause au porteur, si dange
reuse mais si féconde. Sur la Méditerranée c’est Gênes, sur
tout après que la sottise de François I” a jeté l’altière répu
blique, qui est en même temps une maison de banque, dans
le camp de Charles-Quint. Située entre les possessions ita-
liennes et ibériques du roi d'Espagne, pas loin de ses do-
maihes bourguignons ni de l'Allemagne, Gênes est le lien
financier entre les fragments dispersés de la maison de Habs-
bourg. Mais son rôle est moins considérable que celui de
Lyon. Nous ne pouvons décrire ici l’organisation des foires
lyonnaises, dont les paiements ont perfectionné le mécanisme
inventé jadis en Champagne. Lyon s’est d’abord peuplé de
Succursales des banques italiennes, surtout florentines, qui
après avoir agi pour la Curie romaine, ont financé les guerres
d'Italie. Elles aussi ont agi sur la politique, car ces ban-
quiers étaient souvent des exilés, des fuorusciti, qu’une in-
tervention royale ramènerait victorieusement dans leur cité :
c’est sous la pression des adversaires des Médicis que Henri Il
fera passer les monts aux troupes du duc de Guise. À côté des
Italiens les Allemands, ceux qui appartiennent au camp hos-
tile à Charles-Quint, par exemple les banquiers luthériens
amis de la ligue de Smalkalde, et aussi les éclectiques, ceux
qui pensaient dès lors que les affaires sont les affaires et
jouaient habilement sur les deux tableaux. C’est grâce à cette
situation que Lyon pouvait donner- la loi au marché interna-
tional des valeurs mobilières.
Les événements ébranlèrent la position de Lyon et ruinèrent
celle d’Anvers. Ils firent ainsi la fortune d’une autre place,
celle d’Amsterdam. Pendant une longue période du xvn° siècle,
il est vain de se demander si la- capitale de l’Europe, qui n’a
pu se fixer à Madrid, est à Versailles, ou bien à Londres. Elle
est chez les marchands de l’Amstel. L’admirable essor de
l'art néerlandais coïncide avec le moment où une habile poli-
tique financière fondée sur le bas loyer de l’argent, a fait de
la Banque d’Amsterdam la plus grande banque de virements
que le moude ait encore connue. Amsterdam a été la première
des grandes villes protestantes à profiter de la révolution in-
tellectuelle opérée par Calvin lorsque, rejetant les subtilités
des canonistes, il a établi la légitimité du prêt à intérêt.
C’est là que s’est opérée la première fois la conjonction du