CONCLUSION.
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Chacun peut obtenir sa part dans la propriété de l’atelier,
à la seule condition de gouverner utilement sa production
et sa consommation, sesaifaires et sa vie, ou de se soumettre
à une tutelle qui supplée à l’insuffisance de ses facultés
dirigeantes. Ajoutons qu’à mesure que la société acquiert
plus de richesse et de bien-être, elle devient plus secou-
rable pour les déshérités; elle ne voue point à la destruc
tion les non-valeurs qui pèsent sur elle, mais elle s’applique
à en diminuer le nombre, en perfectionnant les méthodes
de la répression, de la bienfaisance et de la tutelle.
Ainsi, nul ne peut plus se dérober à la lutte pour l’exis
tence; nul ne peut plus s’abriter derrière un privilège de
caste, de nationalité ou même de sexe; nul ne peut plus
se cantonner dans une sinécure; nul, pour tout dire, ne
peut plus vivre aux dépens d’autrui. 11 faut que chacun
fournisse aux autres l’équivalent de ce qu’il reçoit d’eux,
mais l’arène est librement ouverte à tous, et en remplis
sant les conditions requises pour la lutte, chacun peut
obtenir, dans les résultats de la production de l’atelier
universel, une part proportionnée à l’importance de son
apport et à la valeur de ses services.
Voilà l’idéal de bien-être et de justice vers lequel se
dirige l’humanité. Elle en est sans doute encore bien éloi
gnée, mais elle y marche; elle n’a jamais cessé d’y mar
cher depuis le jour où l’invention du premier outil l’a
élevée au-dessus des autres espèces animales. Elle est
arrivée maintenant à la dernière étape qui précède l’ère
nouvelle; il dépend d’elle de la franchir plus ou moins
vite. Plus tôt elle aura remplacé le matériel de la petite
industrie par celui de la grande ; plus tôt elle aura détruit
les obstacles naturels et artificiels qui s’opposent à 1 uni
versalisation de la concurrence; plus tôt enfin elle aura
adapté l’individu, aussi bien que l’appareil qui supplée à
son insuffisance intellectuelle et morale à pratiquer le