468
l’évolution économique.
entrer dans une carrière libérale. S’il s’agit d’une inno
vation en matière d’association et de crédit, on aura à
compter avec les prescriptions et les interdictions d’un
code qui ne reconnaît comme licites que les formes et les
applications déjà existantes et autorisées de l’association
et du crédit. S’il s’agit enfin de nouvelles institutions poli
tiques, comment pourraient-elles être acceptées par le
personnel en possession des anciennes? Supposons que l’in
troduction de la locomotive, de l’éclairage au gaz, etc.,
eût été subordonnée au consentement des propriétaires de
la machinery existante, ne serions-nous pas réduits encore
à voyager en diligence et à nous éclairer à la chandelle?
Supposons qu’en ce moment, les actionnaires des compa
gnies du gaz aient le pouvoir de décider s’il y a lieu ou
non d’utiliser la lumière électrique : un homme qui pas
serait son temps et dépenserait sa fortune à chercher la
solution du problème de l’éclairage par l’électricité,* ne
serait-il pas considéré à bon droit conime un esprit chi
mérique et ne mériterait-il pas d’être pourvu d’un conseil
judiciaire? Telle est la situation des hommes qui entre
prennent d’innover dans un domaine encore fermé à la
concurrence. Cependant, un moment arrive où une société,
dont les conditions d’existence ont changé sous l’influence
du progrès matériel, ne peut plus supporter son ancienne
machinery de gouvernement. Elle fait alors une « révolu
tion )) ; elle renverse violemment des institutions qui ne
s’adaptent plus à ses besoins et elle s’efforce d’en créer
d’autres. Malheureusement, les sciences morales et poli
tiques en retard ne lui fournissent point les lumières né
cessaires pour accomplir cette tâche difficile ; elle demeure
livrée aux tâtonnements des empiriques et aux chimères
des utopistesjusqu’à ce qu’une réaction la ramène au point
d’où elle était partie, et rétablisse les institutions qu’elle
avait renversées, en se bornant le plus souvent à en