IMRÜDL’CTIOIS
Car Ia domination des Turcs ottomans n’enfonça pas dans
le sol conquis, du moins en Europe, de profondes racines.
Ils se superposèrent aux peuples vaincus sans faire effort
pour se fondre avec eux. Il y avait peut-être impossibilité
à fondre Turcs de race finnoise avec Grecs ou Slaves de race
aryenne, musulmans avec chrétiens. Ils se contentèrent de
se faire craindre, d’étouffer toute rébellion par une violence
féroce, jusqu’au jour où cette rigueur s’usa, où les sultans
préférèrent le harem aux batailles, où les janissaires, séden
taires et mariés, furent de moins farouches guerriers. Et
dès lors, c’est-à-dire dès le xvii® siècle, l’empire ottoman
s’affaiblit, ses frontières reculèrent, il se resserra sur lui-
même, se dessécha, perdit toute sève, comme un fruit qui se
ride en vieillissant.
La retraite de l’Islam en Europe et en Asie, de part et
d’autre du Bosphore et des Dardanelles, donna naissance à
la question d’Orient. Son histoire est proprement l’histoire
des progrès des nations voisines au détriment des peuples
musulmans.
Elle a par suite des caractères religieux. Le triomphe de
Mahomet II et de Soliman le Magnifique, en pleine terre
chrétienne, fut celui du croissant sur la croix ; Mahomet II
effaça sur les murailles de Sainte-Sophie les images chré
tiennes ; Soliman planta le vert drapeau de Mahomet sur
les murailles de Belgrade et le porta jusque sous celles de
Vienne ; il chassa de Rhodes les chevaliers de Saint-Jean
de Jérusalem, les derniers des croisés. De nos jours, les
victoires des Russes sur les Turcs, la résurrection des états
chrétiens des Balkans, sont la revanche de la croix sur le
croissant, et de toutes parts, dans le Turkestan, au sud du
Caucase, sur le Danube, sur l’Archipel, en Syrie, sur le Nil,
vers l’Inde, les peuples chrétiens font reculer l’étendard du
prophète. Gigantesque croisade, auprès de laquelle celles
du moyen âge furent des jeux d’enfants.
Comme la possession de ces régions historiques est d’im
portance capitale, comme les peuples européens ont
aujourd’hui en Asie, au delà de l’Indus et de la mer d’Aral,
des intérêts vitaux, comme le maître de Constantinople et
de l’Asie antérieure peut devenir le maître de l’ancien conti
nent, toute l’Europe suit avec anxiété l’évolution de la ques
tion d’Orient. La Russie, très bien placée, très jeune et
pleine de foi, la domine toute par le nord, du Danube au
Pamir. Mais la France a aussi, sur toutes ces côtes de la