PROGRÈS DE L’AUTRICHE. Í1
par la générosité du roi de France. D’autres considérations
pourtant agirent sur l’esprit de Louis XIV pour lui faire
oublier les intérêts de l’alliance, séculaire déjà, de la France
avec les Ottomans : en d’autres circonstances encore, ses
sentiments religieux l’emportèrent sur les intérêts les plus
évidents de son royaume. Il eut été aussi fier que Charles-
Quint de conduire contre les Turcs quelque magnifique
croisade; s’il ne prêta pas une grande attention au projet
que lui soumit Leibniz en 1671 d’une conquête de l’Égypte,
c’est qu’il se préparait à l’invasion de la Hollande, et qu’il
avait pour les hérétiques autant de haine que pour les
Infidèles. Il eut la satisfaction de faire bombarder Tunis et
Alger (1665) et montra à ses successeurs le chemin de ces
repaires de pirates. Il envoya Duquesne dans le Levant ;
celui-ci fit une descente à Chio, parut dans les Dardanelles
avec ses vaisseaux, jeta la terreur au Sérail, et, sous la
menace de ses canons, fit renouveler les privilèges jusque-là
reconnus au commerce français. C’est la dernière fois
d’ailleurs que les rois de France se mettent aussi décidé
ment au rang des ennemis du sultan : la tradition de
François I®'' l’emportera bientôt pour deux siècles sur les
idées de croisade.
L’armée impériale, grossie des 6.000 Français que com
mandaient Gassion, Coligny, La Feuillade, fut conduite en
Hongrie par le grand capitaine Montecuculli et rencontra
l’armée du grand vizir à Saint-Gothard, sur le Raab. A la
vue des soldats français, à la coiffure ornée de longues
perruques blondes, les Turcs se moquèrent et les prirent
pour des jeunes filles. Ils se moquèrent peu de temps ; les
perruques blondes se battirent bien et eurent le principal
honneur de la victoire : car l’empereur leur en témoigna
quelque humeur. Le sultan, par la convention de Vasvar,
confirma les stipulations du traité de Sitvatorok.
L’empereur ne tira pas encore un grand profit de son
succès ; il se mêla aux affaires de l’Occident et à la guerre
de Hollande. En 1682, Emerich Tœkely, prince de Tran
sylvanie, tenta de soulever la Hongrie autrichienne et en
revendiqua la couronne. H fit alliance avec le sultan qui se
disposa à soutenir ses prétentions. Le grand-vizir Kara-
Mustapba, gendre de Kœprilü I", à la tête de 100.000
Turcs, envahit l’Autriche et se porta aussitôt sous les murs
de Vienne ; il en poussa le siège avec une grande activité.
Mais la résistance fat très énergique ; la ville pourtant eût