Full text: Principes d'économie politique

LA NATURE 
Ce jour-là l’agriculture naquit. Cependant elle n’a certaine- 
ment pas commencé par l’opération que ce mot implique 
aujourd’hui : le labour. Car labourer la terre suppose une 
accumulation déjà énorme d’inventions, non pas seulement 
la charrue, mais le fer qui arme la charrue et que le bronze 
de l’âge antérieur n'aurait pu remplacer. Elle suppose le 
dressage du taureau pour subir le joug, car c’est un fait 
curieux que pendant des milliers d'années l’homme ait su 
utiliser le bétail comme fournisseur d’aliments et de vète- 
ments et le cheval comme compagnon de course et de 
guerre, mais non comme aides pour son travail. Enfin l’agri- 
culture suppose la découverte des céréales, à commencer par 
l’orge qui paraît avoir été la première employée. L'imagina- 
tion s’effare à mesurer la portée de l’acte de l’homme qui, le 
premier, sut reconnaître que quelqu’une de ces humbles 
graminées portait des grains bons à manger. 
Il parait donc probable que la culture des céréales a dû 
être précédée par une horticulture ou arboriculture rudi- 
mentaire, pratiquée déjà par les peuples chasseurs ou pas- 
teurs, quoique leur vie nomade ne dût guère s’accorder avec 
le jardinage. Il y a peut-être une signification historique dans 
le récit de la Genèse qui nous montre Adam cultivant le 
jardin d’Eden et cueillant les fruits des arbres avant que 
Caïn füt labqureur. 
L'agriculture, au sens de labour, ne doit guère monter au 
delà des débuts des temps historiques. Les auteurs de l’anti- 
quité en célèbrent la naissance comme un événement relati- 
vement récent (1). Ils la saluent comme l’ère de la civilisa- 
tion, se montrant un peu injustes en cela pour l’âge pastoral, 
mais parce que celui-ci n’avait pas tenu en Europe la même 
place qu’en Asie. La culture du blé a cependant imposé aux 
fils de Japhet un travail beaucoup plus intense que les modes 
précédents d’exploitation de la terre, non seulement le tra- 
(1) « Cérès apprit aux hommies à retourner la terre lorsqu'ils ne trouvèrent 
plus de glands ni d'arbouses dans la forêt sacrée ». 
(Georgiques, liv. 1, vers 147-149). 
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