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l’industriel de ce qu’est ou de ce que sera son coût de production. Si nous ajoutons
à cela que l’agriculteur a également une idée bien moins exacte de ce que sera
sa production — étant donné les causes et influences naturelles qui échappent
à son action — on comprendra aisément pourquoi l’économie agricole est, pour
le fermier, une source d’inquiétude constante. Cette inquiétude devient plus
accentuée dans des temps de crise, telle que fut, par exemple, la période d’après-
guerre, au cours de laquelle l’inquiétude dégénéra presque en panique.
Mais quelle que soit l’importance que ces considérations peuvent présenter
pour le producteur, elles n’en intéressent pas moins très vivement la société dans
son ensemble. Il est évident, en effet, que la société doit assurer son propre ravi-
taillement; il est non moins évident (ou il devrait l’être) que la société doit pour-
voir à cet approvisionnement sur la base de la justice sociale à l’égard de ceux
de ses membres qui contribuent à la production des denrées alimentaires. Pour
cela, une connaissance des faits est indispensable, car, sans elle, il ne peut y avoir
de répartition équitable des frais et des profits.
La présente étude a été préparée par le Bureau international du Travail,
pour la Conférence économique internationale, en exécution d'instructions données
par la sous-commission d’agriculture du Comité préparatoire de cette Conférence.
II. LES DIFFICULTÉS DUES A L'EMPLOI SIMULTANÉ DE MÉTHODES
DIFFÉRENTES
Les facteurs déterminants du coût de la main-d’œuvre agricole sont encore
peu connus. Le présent mémoire se propose uniquement d’étudier une très modeste
série de données recueillies dans différents pays. L'enquête à laquelle il a été procédé
a été strictement limitée à la détermination de quelques faits, c’est-à-dire que
nous nous sommes abstenus de toute discussion de la notion de justice sociale.
Il pourra être utile de donner, en premier lieu, certaines indications sur les
différentes méthodes employées pour la réunion des données. Les réserves qui
s’imposent en raison même de ces méthodes apparaîtront si manifestement à la
lecture du rapport qu’il est à peine nécessaire de les formuler.
Les méthodes de centralisation des données agricoles sont au nombre de
trois: la méthode du recensement, celle de la comptabilité et celle de l’enquête
spéciale. La méthode du recensement consiste à recueillir le plus grand nombre
possible de données sur la population agricole, les conditions de la propriété fon-
cière, les frais totaux de production et le coût des salaires agricoles, puis tous ces
chiffres ayant été classés, par exemple par catégories d’exploitation, à procéder
aux opérations arithmétiques nécessaires pour obtenir des moyennes du coût du
travail agricole, soit par unité d’étendue cultivée, soit par ouvrier, soit par rapport
au coût total de la production. Cette méthode présente l’avantage de porter sur
le plus grand nombre possible de données. Elle présente l’inconvénient que, dans
l’élaboration de ces données, le rôle des services centraux de statistique est très