RÉFLEXIONS SUR L'HISTOIRE DES BANQUES 81
chandises françaises, un autre a des londs à Lyon et voudrait
importer des marchandises italiennes. 1ls se donnent mutuel-
lement des lettres, l’un sur Lyon, l’autre sur Venise. Dès
qu’ils apprennent que ces marchandises sont vendues, ils
pensent se procurez de l'argent par change sur Londres et
acheter des marchandises anglaises, Si elles ne sont pas ven-
dues, ils donnent à leurs facteurs de Londres l’ordre de
prendre des rechanges, soil à un ou deux usages sur Anvers,
soit à un usage sur Lyon. Ainsi peuvent-ils, sans grande
perte, disposer de la valeur de leurs marchandises, « bien
longtemps avant que l’argent soit réellement disponible ». Ils
peuvent donc remettre aussitôt, et pour la même durée, cet
argent dans les affaires (*). Certaines banques hollandaises
(Delft et Rotterdam) seront encore créées, en 1621 et 1635, à
la demande des Merchant Adventurers ().
A beaucoup d’égards, la période qui correspond aux der-
niers temps d’Elisabeth et de Henri IV et à la trêve de douze
ans est une période de stabilisation après la crise, mais aussi
de resserrement du marché de l'argent. Il n’est plus possible,
ni aux Etats faméliques, ni aux négociants en quête d’avances,
de puiser à leur gré dans les grands réservoirs lyonnais, an-
versois, génois. Les paiements en foire, les changes reportés
de foire en foire n’ont pas disparu, mais ils ne sont plus le
principal moyen de règlement des grandes affaires, surtout
des affaires internationales. Ils sont remplacés par des insti-
tutions à caractère permanent, à responsabilité plus tangible.
Aux virements de parties pratiqués sur la Place du change se
substitue une formule non pas nouvelle, puisqu'elle avait été
usitée à Venise, mais renouvelée, celle du giro, c’est-à-dire
du virement entre comptes en banque.
(!) Texte cité dans BLann, Brown el Tawwey, Economic History. p. 420.
De même, en 1571, le docteur du dialogue Upon usury (p. 68) disait :
« La plus grande quantité de marchandises exportées ou importées est
achetée par argent qu’on se procure par change ». C’est par lettres sur
Lyon que les marchands de vin anglais, avec l’aide des banquiers italiens,
règlent. leurs achats à Bordeaux ; les exportations de « cottons » gallois
sur France sont financées par des marchands londoniens, qui escomptent
des lettres sur Rouen. Voir aussi sur ce point le Canker (1601) et la Lex
Mercatoria (1622) de Gérann ne Mauynes.
(2) Sur les changes entre l’Espagne et l'Amérique, on recourra aux
récents travaux, matériaux d’un livre futur, de M. Savous
Hausee, Prohl. écon.