Full text: Oeuvres complètes

DE DAVID lilEAHDO. ix 
siècles, pour une œuvre ou l’on ne craignit pas de mêler le nom de la pa 
trie? En tous cas ces longues boucheries, que l’on nomme des batailles et 
que I héroïsme suffit a peine pour réhabiliter, sont de tristes enseignements 
à donner aux hommes. Aujourd’hui des rois coalisés crucifient un peuple : 
demain, des bandes, ivres de carnage, crucifieront toute une caste, comme 
dans la Gallicie. C’est là l’implacable logique du crime, et le sang ré 
pandu en haut, soit en immolant une nation, soit en poignardant une 
femme, retombe de cascade en cascade Jusque sur l’échafaud où râle le 
truand. 
D’ailleurs, la lutte de principes, d’hommes, d’intérêts, d’influence qui se 
personnifia en deux grands peuples, la France, l’Anglelerre : — l’une di 
vorçant avec le passé, et s’élançant d’un seul bond jusqu’aux limites ex 
trêmes de la démocratie : l’autre se cramponnant à ce qui fut, et bornant son 
idéal à une constitution oligarchique : cette lutte qui finit par entraîner 
toute l’Europe dans un vertige analogue à celui qui arme souvent les bras 
des témoins dans les duels d’homme à homme, ne s’accomplissait pas seule 
ment sur les champs de bataille. Elle prenait toutes les formes tous les 
théâtres, et variait à l’infini le choix des armes. Les chancelleries’n’étaient 
plus que des conseils de guerre, rêvant des conflits immenses, dont le tra 
vail agricole et manufacturier faisait tous les frais. On se haïssait non-seu- 
ement sur les champs de bataille, mais encore sur les marchés, dans 
les arts dans les sciences, et le suprême effort de chaque pays étdt d’a- 
neantir la production et la richesse des autres comme on encloue les ca 
nons de l’ennemi. L’Angleterre, la France, la Russie, l’Autriche se jetaient 
leurs enfants à la tête et se mitraillaient avec de l’or, du coton, des pro- 
locóles, des édits, des blocus aussi bien ([u’avcc des liouicts. 
Les decrets passionnés de la Convention avaient Isolé l’AuiîIctcrre sous 
le point de vue politique et commercial, et en avaient fait une sorte de la- 
7.aret, où I on eraipnalt de voir se répandre, avec des dots de marchandises 
suspectes, des principes entachés d'aristocratie. Il est bien évident même 
que l'Idée de protéger notre industrie avait peu influé sur ces décrets. 
Le comité de salut publie, dans ses implacables et sombres résolutions 
songeait i autre chose qu’à garantir des profits élevés aux marchands de co- 
servaient a subventionner la coalition ; et II faut croire qu'il n’aurait 
pas menace de conlIscaUon et de mort les détenteurs de marchandises an- 
d tnine n auraient jamais forcé la main à un gouvernement qui se dlstin- 
^a surtout par I immolation des intérêts privés. Kt si l’Kurope a assisté, 
mal * ^tonnant spectacle de deux peuples qui, déjà, se serraient la 
n au travers du détroit, qui marchaient par la solidarité des intérêts à
	        
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