384 LA FIN DU MOYEN AGE
salarié de la grande industrie véeut en général d’une
façon misérable dans les taudis et les faubourgs des villes,
les patrons et les compagnons du petit commerce et de la
petite industrie connurent une existence assez douce, dans
laquelle le principal élément, l’alimentation, paraît avoir
été surtout abondante et même parfois plantureuse, notam-
ment en Rhénanie, en Flandre et en Angleterre. A Franc-
fort au xvè siècle la consommation de la viande atteignit
125 à 150 kilogrammes par tête, autant qu’au début du
XIX° siècle. Un voyageur de cette époque remarque
qu’aux Pays-Bas et en Angleterre, « il meurt plus de gens
de trop manger et boire que des maux de la faim ». Jamais
dans les villes, il n’y eut plus de fêtes, plus de tavernes,
plus de fureur du jeu, plus de licence dans les mœurs.
Florence et Venise eurent chacune 12.000 à 14.000 prosti-
buées. Jamais aussi la population urbaine ne fut plus mobile,
plus portée aux œuvres de solidarité et de charité, plus
encline à accueillir les idées nouvelles, qui, sous le couvert
de la réforme religieuse, travaillaient sourdement les
masses populaires. Jamais enfin, elle n’eut un plus vif
sentiment de ses droits, une audace d'esprit et de carac-
tère plus agissante pour les revendiquer et essayer d’en
assurer le triomphe.
Les révolutions urbaines à la fin du moyen âge et les
tentatives de conquêtes du pouvoir par les classes ouvrières.
— Le siècle final du moyen âge est en effet par excellence
celui des grandes révolutions urbaines. Bien qu’en général
dans l’Occident, pendant la période antérieure, le régime
nrbain eut été modifié sous la poussée des classes labo-
rieuses, dans un sens démocratique, il s’en fallait de beau-
coup que les éléments populaires y eussent acquis la pré-
pondérance. Tantôt, le patriciat s’était partiellement
maintenu aux affaires, comme en Allemagne ; tantôt, com-
me dans les Flandres, la démocratie ouvrière avait dû parta -
yer le pouvoir avec la bourgeoisie. Ici, commeen France,