LE TRAVAIL PENDANT LE HAUT MOYEN AGE
(collegia) étaient reconnus et respectés; ils figuraient dans la
hiérarchie officielle, de même que la classe commerciale
des marchands (mercatores) organisée sur le même modèle.
Bien que l’Empire souffrit de l’existence d’un prolétariat
urbain oisif et misérable, de l’extension du paupérisme,
de la dureté du régime imposé aux pauvres et aux classes
inférieures, deux progrès d’une portée capitale avaient
été accomplis. Sous l’influence des idées stoïciennes et
chrétiennes, plus encore sous l'empire des nécessités éco-
nomiques, l’esclavage, cette forme dégradante et peu pro-
ductive du travail avait disparu presque entièrement, au
profit de l’artisanat libre dans les villes et du colonat dans
les campagnes. Une foule d’hommes étaient parvenus,
sinon à la liberté complète, du moins à une demi-liberté.
Le colonat était devenu le régime normal des populations
rurales, préparant l’avènement du vilainage médiéval.
Grossi au Iv° siècle d’une foule d’éléments nouveaux venus
des villes, il assurait aux cultivateurs les droits des citoyens
romains, la liberté personnelle, l’usufruit des terres, la
stabilité, la sécurité de l’existence.
Malgré la erise économique qui'avait été provoquée par
les invasions du 111° siècle et les excès du fiscalisme impérial,
l’Europe romaine n’en était pas moins, au début du
ve siècle, la partie du monde où la prospérité matérielle
se maintenait au plus haut degré. Si quelques contrées,
telles que la Grèce et l’Italie péninsulaire, avaient été très
éprouvées par la dépopulation, les guerres ou les trans-
formations économiques, bien d’autres régions présen-
taient le spectacle de la fertilité, de l’aisance ou du bien-
être, notamment la Macédoine, la Thrace, la Dalmatie,
l’Italie du Nord, l’Espagne, les Gaules, la Grande-Bre-
tagne. Dans des provinces entières, comme l'Aquitaine,
les pauvres sont presque inconnus, observe Ammien
Marcellin. En quatre siècles, Rome a su faire, de la partie
de l’Europe soumise à ses lois, un foyer d’activité produe-
tive. Elle en a transformé l’aspect : la forêt y a été éclaircie