; PRINCIPES D'ÉCONOMIE POLITIQUE
consommateurs et que la libre concurrence y pourvoira. En
effet, disent-ils, sous le régime de libre concurrence tout
producteur doit s’évertuer à servir pour le mieux le client,
le consommateur, à lui donner ce qu’il a de mieux pour le
moindre prix. En sorte que le consommateur n'aurait,
comme un roi, qu’à se laisser servir.
Les faits ne justifient pas ce tableau optimiste. Sans doute
le producteur a intérêt à satisfaire le client puisque c'est
généralement pour lui le plus sûr moyen d’accroître sa
clientèle et par là ses bénéfices, mais ce but n’est qu’un but
médiat : le but immédiat c’est le profit et nullement le ser-
vice d’autrui. Et s’il peut arriver à augmenter davantage son
profit en majorant ses prix ou en vendant des denrées
falsifiées, l’expérience prouve qu’il n’y manquera pas. On
sait combien, dans ces derniers temps et par tout pays, la
majoration des prix et la falsification des denrées ont pris
des proportions inquiétantes. Sans doute l’esprit profession-
nel, l’honneur commercial, peuvent donner au consomma-
teur certaines garanties, mais alors nous sommes ici sur le
terrain de la morale et non plus de l’économie politique.
Le consommateur fera donc bien de ne pas se fier au
laisser-faire et de ne pas s'endormir dans le rôle du roi fai-
néant. Il a besoin de défendre énergiquement ses intérêts
qui se confondent d’ailleurs, et c’est ce qui fait leur supério-
rité, avec les intérêts les plus généraux de la Société.
Mais ce pouvoir du consommateur est resté absolument
théorique jusqu’à ces derniers temps, faute d’organisation.
La consommation ne crée pas entre les hommes la même
communauté d’intérêts, la même concentration permanente
d’efforts, que le fait l’exercice d’une même profession,
nonobstant la concurrence. C’est pourquoi l’organisation
professionnelle a devancé de beaucoup l’organisation des
consommateurs. Mais depuis peu celle-ci commence à se
réaliser sous des formes d’associations très diverses,
Les unes ont l’ambition de faire une révolution en faisant
passer le gouvernement économique des mains du produc-
teur entre celles du consommateur : ce sont les sociétés
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