LA PROPRIÉTÉ EN OCCIDENT 107
règne une discipline inflexible, qui assigne à chacun sa
tâche et sa rémunération, d’après les principes d’une sorte
de coopérative de production et de consommation. À
l’administration de chacun des serviceséconomiques préside,
soit an économe (cellarius), soit un prévôt ou un doyen.
Chaque moine a sa fonction, de même que chaque sujet
des moines a la sienne, sous les ordres de chefs jardiniers,
laboureurs, pêcheurs, forestiers, porchers, bouviers ou
bergers. Une stricte économie règle la distribution et la
conservation des produits. On garde avec un soin extrême
les récoltes, les instruments de labour et les ferrements,
jusqu’aux vieux habits et aux vieilles chaussures. Dans
les grands domaines royaux, tels que ceux de l’Aquitaine
auxquels s’applique le fameux capitulaire de Charle-
magne (de villis), on retrouve la même organisation avec
moins de rigidité. Des agents généraux (judices, majores)
ou intendants y gouvernent un ou plusieurs domaines,
ayant sous leurs ordres, à la tête de chaque service, des
agents spéciaux et tout le peuple des sujets. La maison lom-
barde avec son gastald, son massarius, son domesticus, le hof
germanique avec son meier ou son vogt, présentent le
même spectacle. Partout, en Occident, l’identité des
besoins a créé dans le grand domaine des organes sem-
blables.
Les terres de ce grand domaine forment, les unes l’en-
semble des parcelles exploitées par les tenanciers auxquels
on en confie la culture (terra indominicata), les autres la
réserve que le propriétaire a gardée pour la faire valoir
directement. Celle-ci est appelé le domaine seigneurial
(dominicum, terra dominicata). Eile comprend, non seu-
lement le noyau central des propriétés, où est installée la
résidence du maître (villa, ‘sala, jronhof, hall, curtis), mais
encore d’autres terres disséminées sur divers points plus
éloignés (cellæ, curtes extertores, xenodochiæ, plebes). On
la fait valoir au moyen de la main-d’œuvre des serfs,
groupés autour du centre ‘domanial, ou bien au moyen de