150 L’APOGÉE DU TRAVAIL MÉDIÉVAL
atteinte parïla propagation du régime féodal. Dans la
plus grande partie de la France, dans l’Allemagne rhénane,
la majeure part des Pays-Bas, de l’Angleterre, de l’Italie
et de l’Espagne, les propriétés libres, qu’on nommait le
plus souvent du nom d’alleux, ont dû se transformer en
fiefs, parce que le seigneur voyait d’un mauvais œil ces
terres exemptes de services ou de redevances, sur lesquelles
il ne pouvait exercer aucun droit de justice et de police,
Elles formaient autant de souverainetés inviolables et
indépendantes au milieu des terres seigneuriales. Par
l’intimidation, par la menace, par la persuasion ou par la
force, les puissances féodales s’efforcèrent à les faire dis-
paraître et à les transformer en fiefs. Elles n’y réussirent
que partiellement en Allemagne, en Espagne et en Italie,
mais elles y parvinrent d’une manière plus efficace en
Angleterre, aux Pays-Bas et en France. En Allemagne,
la propriété libre s’amoindrit dans les pays rhénans, mais
alle survécut'dans une large mesure en Suisse, en Tyrol, en
haute Bavière, en Souabe, en Thuringe, en Saxe, en Frise,
en Holstein, grâce à la puissance des communautés de
village et à la moindre force de l’organisation féodale dans
ces régions du x° au xm® siècle. Là continuent à subsister
des paysans dont la propriété ne relève que du prince
(schäffenbären, biergelden), dont certains (les lehnbauern)
peuvent même acquérir des fiefs, dont d’autres sont de
véritables souverains fonciers dans leurs terres appelées
fiefs du soleil (sonnenlehen). Ces petits propriétaires libres
des campagnes (freie bauern), soumis uniquement à la
juridiction royale (immédiaieté), ont leurs tribunaux for-
més de leurs pairs, sous la présidence d’un délégué royal
Pamtmann), et ils sont, comme les nobles, en droit de
porter les armes. Dans l’Espagne du Nord, à l’abri de
leurs vallées Sauvages, les communautés pyrénéennes,
sroupements de forestiers et de pasteurs, se sont mainte-
nues en possession de leurs bois et de leurs pâturages,
concluent entre elles des conventions (lies et passeries)