LRS ‘CAMPAGNES DANS L'ÈRE FÉODÂLE 181
matérielles voisines de la gêne ou de la misère. La masse
des cultivateurs est formée de pauvres gens que le poids
des charges accable et qui n’ont pas leg moyens d’améliorer
leur vie quotidienne. Leur habitation n’est qu’une cabane
(tugurium, pisilium), au toit de chaume, au sol de terre
battue, munie d’un mobilier sommaire. Elle n’a pas
changé d'aspect depuis des sièeles. Leur vêtement de
laine ou de toile est grossier. Leur nourriture êst frugale.
Le vilain, dit un prélat moraliste au commencement du
xmr° siècle, ne boit jamais du fruit de sa vigne et ne tâte
jamais d’un bon morceau, trop heureux s’il lui reste son
pain noir et une part de son beurre ou de son fromage.
S'il a grasse oie ou la géline,
Un gastel de blanche farine, (
A son seigneur tot le destine.
Il ne peut garder pour lui et les siens que le strict néces-
saire. De par la loi sociale de son temps, il est tenu, dit
l’évêque Adalbéron, avant toutes choses, de fournir aux
classes possédantes « l’or, la nourriture, le vêtement ».
Et un autre pieux publiciste, Etienne de Fougères, con-
vient que le rôle du vilain est de «terres arer » (labourer),
nourrir aumailles (bétail) pour le profit de ses maîtres,
Car chevalier et clerc, sans faille,
Vivent de ce qui travaille. ‘
Mauvais système de culture, exactions, brigandages
et guerres féodales, fléaux du ciel, épizooties, inonda-
tions, sécheresses, récoltes déficitaires, tout semble alors
conjuré pour empirer la situation du peuple des travail-
Jeurs d'Occident. Comme on ne sait point aménager des
réserves et comme chacun vit dans sa seigneurie, la famine
sévit à l'état endémique. Cette sinistre ouvrière de mort
promène continuellement ses ravages. De 970 à 1100, en
France, On ne compte pas moins de soixante années où elle